Après son livre à charge contre la filière tabac (« Fumer, c’est de droite » / voir 5 septembre), le cardiologue Olivier Milleron – dans une tribune publiée dans Libération – s’en prend au plan de lutte contre la contrebande de tabac présenté la semaine dernière par Gabriel Attal (voir 4, 5 et 6 décembre).
Et en profite pour tirer sur les cigarretiers, la politique du Gouvernement et les buralistes … Extraits.
(…) Il déclare vouloir « assécher les trafics et harceler les trafiquants ». Pour cela, 300 postes de douaniers seront créés, et 45 millions d’euros seront dépensés pour tripler le nombre de scanners mobiles.
La première motivation de ce plan est que ce commerce illicite « représente une perte fiscale de 2,5 à 3 milliards d’euros pour l’État ». Mais comment expliquer que le ministre n’évoque pas le principal acteur du commerce illicite de cigarettes : l’industrie du tabac, Big Tobacco. Devant cet oubli, on hésite entre stupéfaction, consternation et inquiétude.
•• Car l’industrie du tabac a un palmarès inégalé en termes d’activités illicites ou immorales : invention de la stratégie du doute, modifications des cigarettes pour augmenter l’accoutumance à la nicotine, pressions sur les États qui mettent en place une politique volontariste anti-tabac par l’utilisation des tribunaux arbitraux supra nationaux, travail des enfants dans les champs de tabac, déforestations, pollutions, mais aussi, contribution à la contrebande de cigarettes.
Car, il faut rappeler que 98 % du commerce illicite concernent des cigarettes fabriquées par les industriels du tabac. La contrefaçon est insignifiante. Et il est de notoriété publique que les cigarettiers inondent les pays limitrophes, sachant que ce surplus fournira le commerce illicite (ou plutôt parallèle) en France. Ainsi, Andorre reçoit 850 millions de cigarettes par an pour une consommation intérieure de 120 millions, et le Luxembourg reçoit trois milliards de cigarettes pour une consommation intérieure de 600 millions.
•• C’est donc en connaissance de cause que le « protocole OMS pour éliminer le commerce illicite du tabac » a été rédigé en 2012 et il préconise deux choses : d’obliger les cigarettiers à fournir une quantité de cigarettes par pays qui correspond à la consommation interne, et qu’un système de traçabilité des paquets de cigarettes soit mis en place avec une surveillance effectuée par des acteurs indépendants de l’industrie du tabac. Lire la suite »