Revenons sur notre information faisant état de l’important démantèlement d’un trafic tabac-stups en Côtes-d’Armor, la semaine dernière (voir 25 janvier).
Plusieurs enseignements méritent d’en être tirés … juste au moment où le Sénat discute la Proposition de Loi transpartisane visant à sortir la France du narcotrafic.
•• Trafic d’ampleur. Au-delà des saisies annoncées, il faut bien prendre la mesure d’un trafic important de cigarettes de contrefaçon (sortant donc d’une usine clandestine … située en Belgique, voire en France ?). Tout le département des Côtes-d’Armor était approvisionné. Les clients (plusieurs centaines formant une sorte de pyramide) communiquaient par Snapchat. Le volume de ventes clandestines portait approximativement sur 2 000 cartouches par mois.
•• Tabac et stups. Le même réseau tournait, à la fois, avec du tabac de contrefaçon, du cannabis et de la cocaïne. Nouvelle preuve d’un rapprochement sur le terrain entre ces deux types de trafic et de mafias : tabacs et stups. Il va bien falloir que les autorités prennent acte de cette nouvelle réalité. Se pose vraiment la question de l’intégration du tabac dans la lutte contre le narcotrafic. Elle pourrait s’intégrer au débat parlementaire actuel.
•• Enquête effective. S’il y a eu enquête c’est que le repérage d’un compte Snapchat très actif a débouché sur une plainte auprès de la Gendarmerie. En l’occurrence, c’est Philip Morris France qui a porté plainte. Cela aurait pu être d’autres acteurs lésés par le trafic. Mais l’important c’est que cette plainte ait été suivie d’une enquête. Conduite avec obstination et succès par la gendarmerie dans ce cas. C’est évident mais rappelons-le : outre son aspect souvent spectaculaire, une saisie n’a de portée que si une enquête pour remonter la filière est effectivement et sérieusement lancée dans la foulée …
•• Jugement atténué. Les jugements de jeudi dernier ont été rapides (ce qui est positif) mais, pour le moment, personne n’ira en prison (bracelet électronique). Ceci grâce à l’utilisation de la Procédure de Reconnaissance préalable de Culpabilité. Reste à savoir si le Parquet a bien appréhendé la gravité de la mixité tabac et stups dans cette affaire.
•• Buralistes gravement lésés. C’est ainsi que les buralistes bretons – que l’on pourrait imaginer comme « préservés » de par leur situation géographique – prennent de plein fouet une véritable explosion des trafics de tabac. L’ensemble de la Bretagne a actuellement un taux de marché parallèle supérieur à la moyenne nationale (source : enquêtes ramasse-paquets des fabricants).
Des chiffres hallucinants :
• 45,8 % à Saint-Brieuc sur le premier semestre 2024 (12,2 % en 2019)
• 50,3 % à Rennes sur le premier semestre 2024 (19,5 % en 2019)
• 50 % à Saint-Malo sur le premier semestre 2024 (17,7 % en 2019)
• 45,6 % à Quimper sur le premier semestre 2024 (16,6 % en 2019).
Avec des pertes économiques conséquentes. Par exemple, près de 500 000 euros de ventes tabac en moins pour l’ensemble des 25 buralistes de Saint-Brieuc en 2024.