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9 Juil 2014 | Institutions, Trafic
 

SénatLe Projet de Loi de Finances rectificative (PLFR) pour 2014 (prévoyant 4 milliards d’économies) a été rejeté dans la soirée de ce mardi 8 juillet ; le Sénat n’ayant pas adopté son volet recettes, au détour d’une majorité de circonstance entre l’opposition et les communistes. Le texte (à partir de ce qui a déjà été voté par l’Assemblée nationale) va maintenant passer en Commission mixte paritaire (sept députés, sept sénateurs) pour accorder les positions sur une version définitive commune.

Plus tôt dans l’après-midi, avait été rejeté « l’amendement de suppression » (contre-amendement) déposé par le groupe communiste pour supprimer l’amendement Grandguillaume portant sur la traçabilité du tabac, déjà adopté par l’Assemblée nationale (voir Lemondedutabac du 25 juin) contre l’avis du Gouvernement.

C EckertOn remarquera, au passage, que c’est la deuxième fois que le secrétaire d’État au Budget, Christian Eckert, est battu à propos de l’article 569 du Code général des Impôts portant sur ce sujet sensible de la traçabilité du tabac.

Sur fond de débat à propos de l’indépendance de ce système de traçabilité, par rapport aux fabricants, comme l’ont mis en avant les députés PS Laurent Grandguillaume et UMP Thierry Solère (voir Lemondedutabac du 23 juin) : au nom du principe selon lequel on ne peut pas être contrôleur et contrôlé.
Sur fond du démarrage de la mise en place d’un système (Codentify), peu onéreux pour la collectivité, mais dans lequel les fabricants sont impliqués (voir Lemondedutabac des 2 avril et 27 juin) : au nom du principe, agité par les milieux anti-tabac, de suspicion systématique.
Sur fond, encore, de rivalités technologique et commerciale entre entreprises intéressées par les enjeux globaux de la traçabilité ; et pas seulement sur le tabac (voir Lemondedutabac du 8 juillet). Sur fond, enfin, de la conformité de l’article 569 du CGI à la nouvelle Directive tabac et au protocole de l’OMS sur la traçabilité.

Dans ce contexte passablement compliqué, quelques extraits des débats d’hier permettent de se rendre compte de la façon dont les parlementaires se sont saisis de l’affaire. Le ton feutré des débats dissimulant mal les sous entendus, au-delà des croisements entre étiquettes politiques :

• Contre l’amendement Grandguillaume :
. Éric Bocquet (sénateur communiste du Nord) : « on peut comprendre la nécessité de lutter contre la contrefaçon des produits à base de tabac et pour leur traçabilité. Cependant, une entreprise privée helvétique a exercé beaucoup de pression pour convaincre de lui confier le marché de la sécurité et de la traçabilité indépendante des produits du tabac. C’est le rôle d’un service du ministère de l’Agriculture ou des Finances et non celui d’une entreprise privée ».
. Philippe Marini (sénateur UMP, président de la Commission des Finances) : « il y a eu quelques commentaires de la presse à ce sujet. Il n’est pas de bonne méthode de laisser perdurer un texte qui suscite de tels commentaires, d’autant que la France n’est pas seule en cause. Un nouveau dispositif pourrait être rédigé de façon transparente, sans laisser place à une quelconque suspicion ».

• En faveur de l’amendement Grandguillaume :
René-Paul Savary (sénateur UMP) : « la Commission des Affaires sociales a largement débattu des méfaits du tabac. Son implication dans les cancers est terrible. Supprimer l’article serait un très mauvais signe à ceux qui sont sensibles à ces dégâts ».

• Position de Christian Eckert (secrétaire d’État au Budget) : « L’affaire est délicate, la pression de certains lobbies est évoquée, celui du tabac ou un autre qui a été cité, et qui est au moins aussi actif (…)
« La France a anticipé, en 2012, sur ce cadre européen, avec l’article 569 du Code général des Impôts. Lequel doit désormais être adapté à la Directive. L’amendement adopté à l’Assemblée nationale prétend la retranscrire dans notre droit. Telle n’est pas l’interprétation du Gouvernement (…)
« On a accusé, à l’Assemblée nationale, le Gouvernement de céder au lobby du tabac. Son objectif est d’assurer la traçabilité, le stockage des données, le contrôle du dispositif mis en place sans en charger des entreprises privées. Nous souhaitons procéder de façon très méticuleuse. La version de l’Assemblée ne nous satisfait pas ».