Une fenêtre sur l’actualité quotidienne de tous les événements liés directement ou indirectement au tabac
11 Sep 2015 | Pression normative
 

Cout Social addictions… À point nommé pour la ministre de la Santé, juste avant l’examen du paquet neutre au Sénat, en début de semaine prochaine (voir Lmdt du 10 septembre). 

Présentée (en « une ») dans l’édition datée du 12 septembre du quotidien Le Monde, cette nouvelle étude établit que le tabac coûte chaque année 120 milliards d’euros à la société française, l’alcool également 120 milliards d’euros (avec respectivement 13,4 millions de fumeurs et 3,8 millions d’usagers « à risque » d’alcool). Pour les drogues illicites, le montant serait de 8,7 milliards d’euros.

Pierre KoppFinancée par la Direction générale de la Santé et pilotée par l’Observatoire francais des Drogues et des Toxicomanies (OFDT), l’étude a été confiée à l’économiste Pierre Kopp, déjà auteur d’une première édition en 2006. Ce même Pierre Kopp est l’un des avocats du CNCT (Comité national contre le Tabagisme) – c’est lui qui a récemment porté plainte contre les fabricants « pour entente illicite sur les prix » (voir Lmdt du 25 janvier 2015) – et il a co-signé récemment une étude sur la légalisation du cannabis (voir Lmdt des 19 et 21 décembre 2014).

Pour parvenir à ces quelque 250 milliards d’euros, ce professeur à l’université Panthéon-Sorbonne (Paris-I) – qui s’est appuyé sur des données épidémiologiques et sanitaires se rapportant à 2010 – a d’abord pris en compte le nombre de vies perdues comptabilisées par l’OFDT, soit 49 051 décès liés à l’alcool, 78 966 au tabac et 1 605 aux drogues illicites.

Pierre Kopp a également intégré le nombre de malades liés à ces consommations (672 000 pour le tabac, 1,2 million pour l’alcool) ressortant des statistiques officielles. Il a essayé d’agréger les dépenses engagées par l’Etat pour les soins, la prévention et la répression. Il annonce aussi prendre en compte les économies de retraites non versées (pour les victimes de ces addictions) et les recettes apportées par les taxes. Quant aux coûts des soins, il les estime à 8,5 milliards pour l’alcool et 25,9 milliards pour le tabac. Et il s’est appuyé aussi sur « la valeur moyenne d’une vie en France » (une donnée utilisée dans certaines études socio-économiques), soit 3 millions d’euros (115 000 euros par année de vie).

Le Monde ne nous en dit pas plus sur le mode de calcul … mais tout cela fait ressortir, comme de bien entendu, que les « deux drogues licites » coûteraient à l’Etat plus qu’elles ne rapportent. « La taxation sur les alcools ne représente que 37 % du coût des soins des maladies engendrées par l’alcool », cite en exemple Pierre Kopp.

Par rapport à l’étude de 2006, les résultats montrent des coûts sociaux du tabac et de l’alcool « approximativement trois fois plus élevés ».

« Ce n’est pas la conséquence d’une augmentation de la consommation et d’une politique publique inefficace », prévient cependant l’auteur, mais plutôt d’une « amélioration des connaissances épidémiologiques » et d’un « changement dans la méthodologie du calcul économique adopté officiellement par les pouvoirs publics ».

« Ce rapport doit permettre de prendre conscience du coût important des drogues pour la collectivité » et de « hiérarchiser les problèmes afin de mieux éclairer les choix d’engagement de dépenses publiques », souligne Pierre Kopp, lequel suggère, par exemple, le doublement du prix du tabac, qui permettrait, selon lui, de« réduire de moitié la consommation ».

À suivre.