On va en entendre parler.
Vingt membres présumés d’un vaste réseau de trafic international de cigarettes en provenance d’Europe de l’Est sont jugés à partir de ce lundi 8 janvier jusqu’au vendredi 12 à Bordeaux. Le tabac de contrebande, produit en Slovénie, était stocké dans des box de plusieurs grandes villes de Nantes à Montpellier afin de ravitailler des grossistes locaux.
Les vingt prévenus ayant organisé et géré un trafic « de grande ampleur » portant sur 77 tonnes en 2020, soit environ 4 millions de paquets. C’est ainsi que l’AFP (sous la plume de Jean Decotte et Pierre Botte) annonce le méga-procès d’une organisation mafieuse dont nous avions annoncé le démantèlement (voir 28 janvier et 7 février 2022).
•• Renvoyés devant le tribunal correctionnel, ils sont soupçonnés d’avoir approvisionné plusieurs villes françaises en cigarettes produites en Slovénie, imitant notamment la marque Marlboro, avec une marge estimée à 20 millions d’euros par Philip Morris France, partie civile.
Originaires d’Ukraine, d’Arménie, de Géorgie ou encore de Bosnie-Herzégovine, ils doivent répondre du délit d’importation ou de vente frauduleuse de tabac en bande organisée et, pour certains, de blanchiment aggravé. Ils encourent 10 ans d’emprisonnement ainsi qu’une amende pouvant s’élever jusqu’au décuple de la valeur de la fraude.
Pour Maitre Marie-Caroline Blaise, avocate de l’un des prévenus originaire de Géorgie, « l’implication des protagonistes a été exagérée » et le procès doit permettre de « rétablir la vérité ». 19 des 20 mis en cause comparaissent libres. Pour Maitre Christian Blazy, qui défend un père et son fils nés en Arménie, les suspects sont « des petites mains ». « On a vraiment le bas du trafic. Et ceux qui sont tout en haut, naturellement, ne viennent pas en France », fait-il valoir, trouvant au passage « surprenant » de voir Philip Morris se prévaloir du statut de partie civile.
•• Selon le parquet de Bordeaux, les cigarettes étaient acheminées en camions depuis la Slovénie avant d’être stockées dans des box en France. Achetée environ 13 euros, la cartouche était revendue deux fois plus chère par les malfaiteurs, soit environ un quart du prix de vente de l’époque sur le marché français.
Ce réseau, « particulièrement mobile » d’après le parquet, a ainsi alimenté le trafic de cigarettes dans les villes de Nantes, Bordeaux, Montpellier et Béziers. « L’enquête et les éléments de preuve recueillis permettent d’établir que le trafic a permis l’importation en contrebande de 77 tonnes de cigarettes entre octobre et décembre 2020 », estime le ministère public.
En avril 2021, une première opération centrée sur les revendeurs grossistes aboutit à l’interpellation de sept individus en France, conduisant à de premières mises en examen devant la Juridiction interrégionale spécialisée (JIRS) de Bordeaux (voir 17 et 13 avril 2021).
Les investigations menées par la section de recherche de la gendarmerie de Nantes, le groupement de gendarmerie de Loire-Atlantique, le Service d’enquête judiciaire des finances (SEJF) de Nantes et l’Office central de contre la délinquance itinérante (OCLDI) permettent de saisir au passage près de 5 tonnes de cigarettes de contrefaçon, 37 300 euros en liquide ainsi que deux véhicules.
En coordination avec les autorités judiciaires slovènes, des perquisitions ont eu lieu en janvier 2022 dans plusieurs sites de production en Slovénie, « abrités dans des hangars discrets situés dans des localités reculées », indique le parquet. Elles ont permis de saisir plus de 26 tonnes de tabac brut, 29 millions de filtres à cigarettes ainsi que plusieurs machines de fabrication. « Ces volumes illustrent l’ampleur de la contrebande de cigarettes contrefaites en Europe », ajoute le Parquet.