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12 Déc 2015 | Trafic
 

TraçabilitéHier soir, l’amendement de Frédéric Barbier et de Bruno Le Roux, visant à une traçabilité indépendante des produits du tabac, a été adopté par l’Assemblée nationale lors de l’examen, en seconde lecture, du projet de loi de finances 2016 (voir Lmdt du 11 décembre).

En voici, la substance des débats.

Frédéric Barbier•• Frédéric Barbier (PS, Doubs) : il s’agit de rétablir un article supprimé par le Sénat (voir Lmdt des 11 décembre ainsi que des 12 et 13 novembre).
Son objectif est de mettre en place une traçabilité indépendante des produits du tabac pour mettre fin au commerce parallèle de ces produits. Les différences de niveaux de taxe entre les différents pays voisins encouragent le commerce parallèle des produits du tabac.
En outre, selon l’Observatoire français des Drogues et des Toxicomanies, les ventes de tabac en France ont baissé de 20 % ces cinq dernières années. On est ainsi passé de 55 milliards de cigarettes vendues en France, en 2010, à environ 45 milliards en 2014.
Au-delà des problèmes de santé publique que ce fléau engendre, il se traduit par un manque à gagner fiscal annuel de 3 milliards d’euros, et une désespérance des buralistes qui subissent un manque à gagner annuel de 250 millions et des fermetures par centaines chaque année.
La France a décidé de ratifier le Protocole de l’Organisation Mondiale de la Santé, qu’elle a signé le 10 janvier 2013, pour éliminer le commerce illicite du tabac. Le projet de loi autorisant la ratification a été adopté à l’unanimité par l’Assemblée nationale le 17 septembre 2015
(voir Lmdt des 17 et 18 septembre ainsi que du 29 avril).

L’Onu a enregistré la ratification de l’OMS par la France, le 30 novembre 2015, après des votes à l’unanimité de l’Assemblée nationale et du Sénat (voir Lmdt du 14 octobre). Il s’agit d’un événement fondamental depuis notre discussion en première lecture.
Pour mettre en application ce protocole le plus rapidement possible, il convient de supprimer l’article 569 du Code général des Impôts. Dans sa version actuelle, l’article 569 du CGI transpose les termes de l’article 15 de la Directive tabac. Il définit la traçabilité mais se borne à imposer que les fabricants et importateurs concluent un contrat de stockage de données avec un tiers indépendant. Il en résulte que, à l’exception du stockage des données, la « directive Tabac » permet que l’industrie du tabac soit en charge de la traçabilité de ses produits, ce que le protocole interdit formellement.
Contrairement à ce qui a été dit, cette suppression de l’article 569 ne crée aucun vide juridique. Bien au contraire, la France va pouvoir mettre en place la traçabilité des produits du tabac telle qu’elle est prévue par le protocole. D’ailleurs, le vendredi 13 novembre en séance, Marisol Touraine, répondant à Bruno Le Roux, a affirmé que le gouvernement allait prendre un décret pour mettre en œuvre le protocole de l’OMS.

•• Frédéric Reiss (LR, Bas-Rhin) : l’article 569 du CGI prévoit la traçabilité. La directive et le protocole sont différents. L’article 569 reprend la même solution que la directive en confiant la traçabilité aux fabricants de tabac. Ce qui est contraire au bon sens.

•• Valérie Rabault (PS, Tarn-et-Garonne, rapporteure générale de la commission des Finances) : nous sommes dans une situation très compliquée. L’article 569 reprend des dispositions de la « directive Tabac », il y a le projet de loi Santé qui complète cet article d’un certain nombre de dispositions.
Vos amendements visent à supprimer cet article mais à ce stade on ne le remplace par rien. Les différents textes se chevauchent. La commission donne un avis défavorable.

•• Michel Sapin : je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.

Bruno Le Roux•• Bruno Le Roux (PS, Seine-Saint-Denis, président du groupe parlementaire socialiste) : juste un mot pour dire que ce sujet vient de loin. Nous nous sommes tous engagés à supprimer l’article 569 en adoptant à l’unanimité la convention de l’OMS. Il n’y a aucun vide juridique mais une nécessité d’aller vite. Et contrairement à ce que j’ai entendu, il n’est pas question de mettre en place cette traçabilité uniquement en France.
Il y a quelques jours, ici-même, nous n’étions pas tous d’accord sur le paquet neutre. Mais nous prenons un risque en ayant le paquet neutre et pas de traçabilité.

•• Christine Pires Beaune (PS, Puy-de-Dôme) : je ne sais pas si cet article aura un impact sur les buralistes mais il en aura sur une usine de mon département. Les salariés de l’usine tabac de Riom m’ont alerté. Je vote contre.

L’amendement est adopté.