À partir du 1er juillet, fumer sera interdit dans de nombreux lieux publics à l’air libre comme les parcs, plages ou abords d’écoles (voir 31 mai et 1er juin). Une nouvelle étape du plan anti-tabac gouvernemental qui, si elle est saluée pour ses intentions sanitaires, laisse un goût amer chez les buralistes selon FranceInfo Centre Val de Loire.
L’interdiction n’est pas une surprise. Elle s’inscrit dans la stratégie nationale contre le tabac dévoilée à l’automne. Pour les buralistes, elle s’ajoute à une série de mesures cumulées qui fragilisent leur activité.
« Je comprends qu’on interdise de fumer sur les plages ou près des écoles », admet Nicolas Pinot, buraliste à Issoudun et président des buralistes de l’Indre (et administrateur de la Confédération / voir 1er juin 2023).
« Mais on continue de cibler les consommateurs légaux, alors que les marchés parallèles explosent. »
Dans son département de l’Indre comme ailleurs, les paquets vendus hors réseau sont devenus monnaie courante. « On en voit tous les jours, et ce n’est pas assez réprimé », ajoute-t-il.
Michel Philippe, son homologue d’Eure-et-Loir (voir le 6 novembre 2024), partage ce constat : « Aujourd’hui, on représente moins de la moitié des ventes. Le reste, ce sont des achats par internet, contrebande ou contrefaçon. »
Les deux hommes ne s’opposent pas à la lutte contre le tabagisme.
« Moi, je suis content quand un client arrête de fumer », sourit Nicolas Pinot.
Pour Michel Philippe, préserver la santé des enfants est « essentiel ». Diminuer la consommation, « c’est aller dans le bon sens ». Mais dans les faits, c’est plus complexe.
Alors, la profession s’adapte : vapoteuses, produits à base de nicotine, relais colis, snacking… « Certains se lancent dans la restauration. Moi, j’ai ouvert un snack et un service colis, ça marche bien », détaille Nicolas Pinot. Le cœur de métier, lui, continue de s’éroder.
Derrière certaines vitrines, la lassitude grandit. Katia Rabilhac, buraliste à Unverre, n’a plus l’énergie d’y croire.
Elle dénonce une injustice : « On interdit la cigarette à 200 mètres d’une école, mais on laisse les points de deal prospérer à côté. Et c’est aux enfants qu’on demande de s’éloigner, c’est absurde », peste-t-elle.
Face à la baisse de la consommation – estimée à plus de 10 % depuis janvier – les buralistes se réorganisent. « On est les derniers commerces dans certains bourgs », rappelle Nicolas Pinot. « Si les bureaux ferment, c’est le dernier lien social qui disparaît. »
La reconversion passe par de nouveaux services. « On essaie d’être constructifs, de proposer des produits moins nocifs », explique Michel Philippe. « À terme, on fera encore baisser la consommation. On essaie de l’anticiper. »