Le vaste programme de diversification se poursuit afin de sauver ces commerces de proximité de la baisse de consommation. C’est ainsi que débute un article du Journal du Dimanche, signé Stanislas de Guerny, de ce 9 juin que nous reprenons.
Philippe Coy, le président de la puissante Confédération des buralistes, a très rapidement flairé le danger. « Pas question pour la profession » indique-t-il au JDD, « de vendre des produits énergisants à sniffer. Nous y voyons un véritable danger pour notre image. » Si ces poudres sont à 90 % naturelles, fabriquées notamment à base de caféine, leur méthode d’administration fait étrangement penser à celle du rail de cocaïne. « 90 % des buralistes, continue Philippe Coy, se déclarent opposés à cette offre qui pose clairement des questions d’ordre éthique. » (Voir 7 juin et 27 mai).
•• Et ce d’autant plus que le président des buralistes se bagarre au quotidien pour améliorer l’image de la profession, avec l’ambition assumée de « faire de nos commerces de véritables drugstores de proximité » en présentant une très large offre de produits et services, parfois très éloignés du tabac dont chacun connaît les méfaits.
Dans le droit fil de cette ambition, 4 500 des 23 000 bureaux de tabac répartis dans l’Hexagone ont d’ores et déjà engagé un vaste programme de Transformation, afin d’attirer de nouveaux chalands pour contrer la baisse de la vente des cigarettes, de l’ordre de 8 % par an.
« Initialement, 85 % des recettes d’un bureau de tabac y étaient liées, on s’oriente vers les 50 % », poursuit Philippe Coy qui veut atteindre les 10 000 points de vente modernisés d’ici à 2027. « Il faut, continue-t-il, arriver à convaincre nos commerçants, souvent économiquement fragilisés, que c’est seulement en investissant qu’ils gagneront plus. »
Les bureaux de tabac rénovés arborent une nouvelle enseigne : il s’agit toujours de la carotte historique, désormais tricolore, et non plus seulement rouge, « afin de marquer notre pleine utilité du commerce local ».
•• Pour réorganiser les boutiques en ville comme en zones rurales, la Confédération des buralistes a su faire du lobbying auprès de l’État : ce dernier a débloqué en 2023 une enveloppe de 100 millions d’euros sur cinq ans. L’argent permet d’attribuer une subvention qui représente 30 % des travaux effectués sur chaque point de vente, avec une limite fixée à 33 000 euros (voir 23 janvier 2023).
L’objectif étant également d’augmenter la consommation des 10 millions de clients quotidiens, l’heure est à la diversification. La Française des jeux, qui leur a confié le Loto et d’autres jeux à gratter depuis des années, vient de flairer un nouveau filon, celui de la banque de proximité.
Elle lance le compte Nirio Premio, associé à une carte que le client non bancarisé peut recharger dans les bureaux de tabac pour régler ses petits achats du quotidien (voir 10 janvier 2024). Une activité qui s’ajoute à celle d’un autre compte bancaire nommé Nickel (filiale de BNP Paribas et de la Confédération), également accessible dans les débits de cigarettes (voir 14 février 2024).
« 3,7 millions de personnes sont équipées d’un compte Nickel », se réjouit le président de la Confédération des buralistes, pour qui la stratégie engagée est la bonne. « Il y a 5 à 6 ans, on voyait disparaître de 400 à 500 bureaux de tabac par an. En 2023, seuls 120 ont fermé leurs portes, principalement des départs en retraite. »
Philippe Coy et son équipe continuent à se battre pour ne pas baisser les rideaux définitivement. Avec un objectif : transmettre ces commerces à des jeunes plus à même de travailler de longues heures, souvent six jours sur sept. Avis aux amateurs.