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3 Mai 2023 | Vapotage
 

Comme nous l’annoncions dernièrement, les polémiques anti-cigarettes électroniques jetables repartent de plus belle (voir 1er mai).

Un collectif de plus de vingt de personnalités – médecins, tabacologues et défenseurs de l’environnement – appelle, dans une tribune au Monde (mise en ligne le 1er mai) à l’interdiction de la cigarette électronique jetable, comme cela est déjà demandé en Allemagne (voir 13 mars 2023) et en Belgique (voir 15 novembre 2022).

Nous la reproduisons intégralement.

Arrivée sur le marché français en 2021, la « puff » est une cigarette électronique jetable à usage unique. Prête à être consommée dès son achat et disponible aussi bien en grandes surfaces que chez les buralistes, elle bénéficie également d’un prix abordable, autour de 9 euros, ce qui la rend particulièrement facile d’accès et d’utilisation.

•• Cependant, si la vente de ce produit est normalement interdite aux mineurs, cela n’empêche pas ses fabricants de déployer des stratégies marketing agressives à destination des jeunes, voire des très jeunes, notamment sur les réseaux sociaux. Outre sa taille et ses emballages de couleurs vives, ce sont les arômes proposés, proches de ceux de confiseries, qui sont particulièrement révélateurs : goût raisin glacé, cerise, cola, licorne, mojito, barbe à papa, choco-noisette…

C’est une stratégie qui semble malheureusement payante puisque la puff est de plus en plus répandue auprès des collégiens et lycéens.

En 2022, selon un sondage de l’ACT-Alliance contre le Tabac, plus de 13 % des adolescents en France révélaient l’avoir déjà utilisée. Les chiffres publiés récemment par l’Observatoire français des Drogues et des Tendances addictives (OFDT) ne font que confirmer cette tendance : l’utilisation par les adolescents de la cigarette électronique, dont la puff, a triplé entre 2017 et 2022. Un nouveau produit plastique et électronique à usage unique qui se retrouve d’ores et déjà en tant que déchet sur les plages.

•• La consommation de ce produit est pourtant loin d’être anodine. Comme l’a rappelé l’Académie nationale de Médecine (voir 2 et 9 mars 2023)  dans un communiqué en février 2023, il s’agit d’un « piège particulièrement sournois pour les enfants et les adolescents ».  

L’utilisation de la puff, qui contient des sels de nicotine, augmente les risques de développer une inflammation des voies respiratoires. Son taux de nicotine, pouvant aller jusqu’à 20 milligrammes/millilitre, est suffisamment élevé pour créer une forte dépendance et peut constituer une porte d’entrée vers le tabagisme. C’est d’ailleurs ce qu’a souligné le Haut Conseil de la Santé publique dans un avis relatif aux cigarettes électroniques publié en 2021 (voir 6 janvier 2022).

•• Au-delà de l’aspect sanitaire, la cigarette électronique jetable est, particulièrement au regard de sa composition et de son caractère non rechargeable, un fléau environnemental contraire à l’esprit de la loi Antigaspillage pour une économie circulaire du 10 février 2020 et de toutes les initiatives pour en finir avec l’usage unique.

Constituées de plastique, d’une batterie non amovible comportant en moyenne 0,15 gramme de lithium, de sels de nicotine et contenant des traces de métaux lourds, les puffs deviennent des déchets complexes, mal collectés, non recyclés et dont les composants peuvent polluer les sols, les nappes phréatiques et les océans. Elles représentent un risque majeur pour la biodiversité.

Du fait de sa popularité grandissante, du manque total de communication environnementale lors de sa vente et de l’absence de dispositif de collecte, la cigarette électronique jetable vient dès aujourd’hui s’ajouter aux milliards de mégots jetés chaque année dans la nature. Au Royaume-Uni, une récente étude estime que 1,3 million de cigarettes électroniques jetables sont jetées chaque semaine (voir 27 mars 2023).

Enfin, lorsqu’ils ne sont pas pris en charge convenablement, ces dispositifs présentent un risque non négligeable d’incendie lié à leur batterie, facilement inflammable. Loin d’être un outil de sevrage tabagique, les cigarettes électroniques jetables représentent un danger environnemental et de santé publique qui nécessite au plus vite l’interdiction de leur commercialisation. 

L’urgence de cette situation a déjà convaincu plusieurs États membres de l’Union européenne d’amorcer des processus d’interdiction spécifique, comme c’est le cas en Allemagne, en Belgique ou en Irlande. La France doit impérativement suivre le même chemin.

•• Lors des débats sur le projet de loi de Financement de la Sécurité sociale pour 2023, le Sénat avait pu prouver sa détermination à agir sur ce sujet en votant une taxe dissuasive sur ces produits, qui n’avait pas été retenue par le Gouvernement (voir 9 novembre 2022).

Il faut aujourd’hui aller plus loin. Nous appelons à soutenir la proposition de loi visant à interdire la cigarette électronique jetable qui a été déposée à l’Assemblée nationale en novembre 2022 et qui a été signée par plus d’une trentaine de députés de tous horizons. Il est maintenant essentiel qu’elle soit inscrite à l’ordre du jour pour qu’elle soit débattue dès cette année par la représentation nationale afin de mettre un terme à cette aberration écologique et sanitaire.

Parmi les signataires : Bernard Basset, président d’Addictions France ; Diane Beaumenay-Joannet, responsable plaidoyer et campagne déchets aquatiques de Surfrider Foundation Europe ; Juliette Franquet, directrice de Zero Waste France ; Alain Furber, président de la Fédération française de cardiologie ; Axèle Gibert, chargée des réseaux prévention des déchets et risques de France Nature Environnement ; Loïc Josseran, président de l’ACT-Alliance contre le tabac ; Anne-Laurence Le Faou, présidente de la Société francophone de tabacologie (SFT) ; Muriel Papin, déléguée générale de No Plastic in My Sea ; Ingrid Rigaux, directrice de la Fédération française des associations et amicales de malades insuffisants ou handicapés respiratoires (Ffaair) ; Anne Stoebner, présidente du groupe onco-addiction, Unicancer …