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16 Jan 2023 | Trafic
 

Dans l’Ouest de la France, un tiers des cigarettes consommées sont issues du marché parallèle et, parmi elles, plus de la moitié sont de la contrefaçon, selon les chiffres de la dernière étude de KPMG (voir 23 et 29 juin 2022).

Dans un entretien avec Ouest France, Grégoire Verdeaux (vice-président en charge des affaires extérieures du groupe Philip Morris international / voir 28 décembre et 11 octobre 2022) commente cette explosion du trafic.

•• La hausse du prix explique-t-elle l’explosion du marché parallèle ?

Grégoire Verdeaux : Présentée comme un moyen pour réduire la consommation chez les fumeurs, la hausse de la fiscalité n’a pas engendré de baisse : 31,9 % des 18-75 ans déclarent fumer en 2021, un chiffre en hausse par rapport à 2019, en lien probablement avec la crise sanitaire du Covid-19. 

La hausse du tabagisme quotidien concerne notamment les femmes et les personnes les moins diplômées. Ces consommateurs ne se fournissent pas chez le buraliste, parce que le paquet à 10 euros est inabordable. On est dans le pire du pire, car la moitié de cette consommation de cigarettes illicites, c’est de la contrefaçon, des produits qui ne sont pas soumis à une réglementation et à des standards de production.

•• D’où viennent ces cigarettes contrefaites ?

G. V. : La plaque tournante est en Belgique. Les usines clandestines, en Belgique et en Europe de l’Est, alimentent des grossistes, des hubs de grandes villes comme Lyon ou Paris, qui diffusent en quantités intermédiaires 2 000 ou 3 000 cartouches à Nantes ou Rennes. Il y a une réplication des points de deal des autres drogues et de la vente à la sauvette dans l’espace public.

L’aspect moins visible, c’est l’utilisation des réseaux sociaux Facebook et Snapchat, en particulier dans les petites villes et zones rurales. Un paquet sur Snapchat, on le trouve entre 3 et 5 euros avec livraison au domicile !

•• Quel est le risque ?

G. V. : Le commerce qui passe du buraliste, avec contrôles de l’âge, aux réseaux sociaux, c’est un risque pour les jeunes qui accèdent facilement à la cigarette. Les sanctions pénales sont plus réduites pour son trafic que pour celui de drogue : c’est un calcul qui peut se révéler très lucratif pour le crime organisé qui a déjà une logistique pour les stupéfiants. C’est préoccupant. 

•• Quelles solutions ?

G. V. : Si on n’offre pas des alternatives à la consommation de cigarettes, on ne règle pas la question du tabac illicite. Le Royaume-Uni avait 32 à 33 % de fumeurs il y a deux ans. Aujourd’hui, la prévalence des fumeurs outre-Manche est deux fois moins importante.

Il y a eu une politique gouvernementale de prévention par l’aide à la cessation de consommation, avec des produits pharmaceutiques, et, pour ceux qui ne peuvent pas arrêter, la cigarette électronique est proposée via le système de sécurité sociale.

•• Début décembre, le Gouvernement a dévoilé un plan de lutte contre ce trafic qui génère une perte fiscale de 2,5 à 3 milliards d’euros pour l’État. Qu’en pensez-vous ?

G. V. : On ne va pas bouder notre satisfaction. Mais on ne va pas demander aux services de police de vider à la petite cuillère un océan qui continue de se remplir. On a vu le Gouvernement être très robuste avec l’industrie numérique pour retirer des comptes qui faisaient de l’appel à la haine, ce serait bien qu’il fasse la même chose auprès des entreprises du numérique pour bloquer des comptes qui font du trafic : la vente de tabac est interdite sur Internet.

Il faut aussi informer le consommateur : acheter sur WhatsApp ou dans la rue ces produits, c’est illégal.