Un test sur ordinateur avec quatre tas de cartes retournées dévoilant des images neutres, positives, négatives ainsi que des photos liées au tabac …
C’est la base du test comportemental sur lequel des chercheurs de l’Inserm, à l’université de Poitiers, travaillent actuellement pour détecter la dépendance au tabac. Ils viennent de publier un article dans la revue Nicotine and Tobacco Research.
Nous reprenons le commentaire de France Bleu Poitou.
•• L’enjeu final : mieux adapter les éventuels suivis médicaux. « Ce test a d’abord été utilisé par des chercheurs américains pour étudier l’addiction à la cocaïne », explique Marcello Solinas, le directeur de recherches au laboratoire de Neurosciences Expérimentales et Cliniques, à l’Inserm de Poitiers. « Ils ont vu qu’ils pouvaient prédire avec ce test les taux de rechute dans les mois suivants. On voudrait pouvoir le faire sur le tabac avec des patients fumeurs. »
Dans ce test, le patient est invité à cliquer sur quatre tas de cartes retournées comme il le souhaite. Chaque clic dévoile une image. Un des paquets contient davantage de photos liées au tabac, qu’il s’agisse de briquets ou de personnes en train de fumer : il peut évoluer au fil du test pour que le patient ne puisse pas anticiper où se trouve quel type de photos.
« On se rend compte que les patients fumeurs cliquent beaucoup plus que des non-fumeurs sur le paquet de cartes qui dévoile dans la foulée des photos liées au tabac » explique Marcello Solinas. « Même quand il change de place, le patient fumeur finit par cliquer davantage sur celui-ci. »
Lorsqu’ils réalisent ce test, seuls 60 % des patients fumeurs sont capables de cibler correctement le type d’images sur lesquelles ils ont le plus cliqué : « comme les non-fumeurs, ils sont davantage attirés par les photos jugées positives (ex : des paysages), mais la proportion de photos liées au tabac est bien plus importante chez eux » précise Marcello Solinas, surtout quand ils déclarent avant le test avoir envie de fumer, c’est très corrélé. »
•• Au-delà de ce constat, mieux cerner les mécanismes inconscients de dépendance à la cigarette doit permettre à l’avenir d’adapter les traitements. « Diagnostiquer la difficulté à se contrôler face à des facteurs environnementaux, ça permet d’apprendre au patient comment éviter d’être guidés par eux » explique le chercheur. « On a des patients très rationnels avec qui on peut utiliser des thérapies comportementales, mais avec d’autres, il faut davantage utiliser des stratégies d’évitement, éviter les contacts avec le tabac de façon presque inconsciente. »
Marcello Solinas et son équipe espèrent ainsi mettre le test à disposition de médecins généralistes, pour que ces derniers puissent évaluer la dépendance de leurs patients et adapter au mieux les solutions d’arrêt de la cigarette. (Voir aussi 17 août et 11 janvier 2023).