Ce 13 mars, Emmanuel Magniez (président des buralistes de Seine-Maritime / Rouen, voir 16 septembre 2019 et 5 mai 2022) est intervenu longuement sur RCF-Normandie à propos du tabac de contrebande.
Phénomène qui a pris tout récemment une singulière importance dans sa région avec le démantèlement de la plus grande usine clandestine de fabrication de cigarettes découverte jusqu’à maintenant en France, à Saint-Aubin-les-Elbeufs, à 24 kilomètres de Rouen (voir 15 et 21 janvier 2023).
Il a déclaré, à ce propos : « nous nous sommes portés partie civile. Nous voulons être dans le dossier … » Par ailleurs, Emmanuel Magniez a eu le temps de se livrer pour les auditeurs à un véritable exercice de pédagogie sur la contrebande et la contrefaçon de tabac. Extraits de ses explications et de son argumentation.
•• La contrefaçon de tabac : « ce sont des cigarettes fabriquées dans des usines clandestines montées par des réseaux mafieux et en dehors de toute réglementation (sur la qualité du produit ou le respect de normes industrielles, par exemple) … La contrefaçon est l’une des composantes de ce que l’on appelle le marché parallèle du tabac : c’est à dire tout le tabac consommé en France et qui ne vient pas du réseau officiel des buralistes. »
•• Son accessibilité : « comme ce tabac est fabriqué complètement en dehors de la légalité, il est le moins cher. En général, il est vendu à la sauvette ou par les réseaux sociaux à 5 euros le paquet. Soit moins de la moitié des prix du marché officiel …
Le plus grave, c’est que ces usines clandestines – nécessitant de lourds investissements de départ et toute une organisation logistique – sont la preuve de l’implantation durable de réseaux mafieux dans notre pays qui travaillent en toute impunité.
De plus, le personnel, lui aussi, de ces usines est en situation de sur-exploitation. Ils viennent des Pays de l’Est et sont astreints à rester 24 heures sur 24 sur place: travailler et dormir sans la moindre sortie. »
•• Des ordres de grandeur : « par définition, pas de chiffres officiels sur le marché noir. Mais, depuis 12 ans, il existe une étude annuelle de KPMG (qui est considérée comme sérieusement menée avec notamment des études ramasse-paquets dans la rue) et qui indique (derniers chiffres disponibles : 2021) que la part des cigarettes non achetées chez les buralistes, c’est 35,4 % de la consommation.
Soit une consommation totale de 51,5 milliards de cigarettes en 2021 : 33,3 milliards de cigarettes achetées dans le réseau des buralistes ; 3,1 milliards de cigarettes achetées à l’étranger (achats frontaliers) ; 6,5 milliards de cigarettes de contrebande (cigarettes de fabricants revendues illégalement parce que détournées de leur marché initial ou volées) ; 8 milliards de cigarettes de contrefaçon. »
•• Comment réagir pour protéger les buralistes ? : « À la demande de la Confédération, Gabriel Attal a présenté un plan de lutte contre le trafic de tabac 2022-2025, le 5 décembre.
Avec plus de moyens pour les Douanes (scanners, mise en place d’équipes opérationnelles pour traquer les trafiquants 24 heures / 24) mais aussi la volonté de placer les peines pour trafic de tabac au même niveau que les peines pour trafic de drogue.
Par ailleurs, l’État et la Confédération ont négocié et signé un nouveau Protocole pour l’accompagnement de la Transformation des buralistes, ce 19 janvier. Celui-ci permet, notamment, au réseau de tenir le choc en cas d’aléas du marché tabac (dus au marché parallèle). »