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20 Déc 2022 | Associations
 

Alors qu’il décroit dans le monde, le tabagisme des médecins reste important en France … Mais ce statut fumeur des médecins les rend moins efficaces dans leurs conseils de sevrage tabagique…

Quelques pistes sont envisagées pour réduire le tabagisme des soignants, peut-on lire sur une communication de la plateforme citoyenne contre le tabagisme « Génération sans Tabac » développée par le CNCT (Comité national contre le Tabagisme) et soutenue financièrement par le Fonds de Lutte contre les Addictions (voir 6 septembre et 23 août).

•• Conduite par une équipe de chercheurs de Clermont-Ferrand, une méta-analyse de 2021 a pointé une forte prévalence tabagique chez les médecins, dans le monde. 

Cette prévalence, estimée à 28 % avant 1985 et à 16 % après 2015, varie fortement selon les continents, les périodes temporelles, le sexe des sujets et les spécialités médicales. On compterait ainsi en moyenne 25 % de fumeurs chez les étudiants en médecine, 24 % chez les médecins généralistes, 18 % chez les chirurgiens et 16 % chez les spécialistes, contre 11 % chez les anesthésistes et 8% chez les pédiatres.

•• Cette tendance est particulièrement marquée en France, où une étude conduite en 2021 auprès du personnel de lHôpital Européen Georges Pompidou (HEGP), de Paris, par la docteure  Anne-Laurence Le Faou indique que 27 % des médecins y sont fumeurs.

Un chiffre qui rappelle une autre étude publiée en 2006, laquelle situait à 26 % le nombre de médecins généralistes fumeurs, reflétant la persistance d’une forte prévalence tabagique en France. Déjà, à l’époque, étaient soulignés l’impact de ce tabagisme sur la relation médecin-patient et la nécessité de renforcer les enseignements de tabacologie dans les études de médecine.

•• Interrogé par le Quotidien du Médecin sur ce tabagisme des médecins, le professeur Daniel Thomas, porte-parole de la Société Francophone de Tabacologie (SFT), estime que « c’est un réel baromètre du tabagisme comme le montre lanalyse de l’évolution temporelle de la prévalence de leur tabagisme comparée à celle de la population générale ».

Le statut tabagique du médecin influerait sur son efficacité dans la prise en charge du sevrage tabagique chez les patients.

« Pour de nombreux soignants fumeurs, le fait de fumer conditionne leur capacité à aborder la question du tabac avec les patients, à conseiller larrêt et à accompagner concrètement et efficacement les fumeurs dans le sevrage », poursuit le professeur Thomas, « à cause du déni, de la mauvaise conscience ou du sentiment d’être en porte-à-faux, le médecin fumeur est en quelque sorte handicapé pour la prise en charge du patient fumeur ».

•• De fait, les médecins fumeurs sont moins demandeurs de formations en tabacologie et sont donc moins équipés pour la prise en charge du sevrage tabagique. Les médecins ayant arrêté de fumer seraient en revanche plus pertinents pour conseiller les fumeurs dans leur démarche de sevrage.

Lexemplarité du médecin ou de tout autre professionnel de santé a son incidence sur les comportements des patients.

L’industrie du tabac en est consciente et s’est abondamment servie durant plusieurs décennies de l’image de médecins fumeurs dans ses publicités vantant des cigarettes supposément moins nocives. Cette industrie met aujourd’hui en avant des médecins pour promouvoir le tabac chauffé, présenté comme un outil de réduction des risques.

Instituer que l’hôpital et tous les lieux de soin soient réellement des espaces sans tabac, et inciter les soignants à réfléchir sur leur statut tabagique sont des thèmes récurrents depuis une vingtaine d’années, mais d’énormes progrès restent à accomplir. L’intégration systématique à la formation initiale et à la formation continue des soignants des connaissances nécessaires à la prise en charge des fumeurs est l’une des autres pistes d’amélioration réclamées.

« Aujourdhui, tous les professionnels de santé devraient être non-fumeurs et créer autour deux un environnement sans tabac », considère le professeur Thomas.  Un objectif qui prend tout son sens si on veut réussir à avoir une Génération sans tabac en 2032, laquelle prévoit que moins de 5 % des enfants nés depuis 2014 soient consommateurs de produits du tabac, conclut la communication de Génération sans Tabac.