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23 Août 2022 | Associations
 

Dans une communication, la plateforme de mobilisation citoyenne contre le tabagisme « Génération sans Tabac » – développée par le CNCT et soutenue financièrement par le Fonds de Lutte contre les Addictions (voir 20 novembre 2021, 8 août 2019) – dénonce l’ouverture de nouveaux estancos (débits de tabac espagnols) outre-Pyrénées (voir 9 août). Nous reprenons cette communication.

Le gouvernement espagnol a annoncé début août vouloir créer plus de 200 nouveaux bureaux de tabac, en mettant l’accent sur les zones frontalières fréquentées par les citoyens français qui traversent la frontière pour acheter des paquets de cigarettes à des prix qui sont en moyenne deux fois moins élevés qu’en France

Une association de lutte contre le tabagisme espagnole (Nofumadores) dénonce cette initiative qui va à contre-courant des dispositions prises dans les deux pays pour parvenir prochainement à une génération sans tabac.

•• Les 203 nouvelles licences seront attribuées pour la première fois par enchères publiques à partir d’octobre 2022.  Cela signifie que l’autorisation d’ouverture sera accordée au prix le plus élevé proposé et ce pendant une durée de 25 ans.

L’acheteur devra ensuite installer son établissement à au moins 150 mètres d’un autre établissement ou d’une école. À l’exception des territoires frontaliers qui voient cette réglementation limitée à 25 mètres, confirmant ainsi la volonté du gouvernement espagnol de concentrer l’offre dans les zones frontalières et attirer les consommateurs français. Certaines communes limitrophes verront ainsi leur nombre de buralistes plus que doubler, à l’exemple de la Jonquera (à proximité des Pyrénées-Orientales) qui pourrait voir son nombre de bureaux de tabac passer de 7 à 17 concessions. 

•• L’augmentation du nombre de bureaux de tabac en Espagne s’oppose en effet à la volonté européenne de réduire le nombre de cancers dans l’Union d’ici 2030 et d’une Europe sans tabac d’ici 2040 et aux politiques de santé de l’Espagne.

L’association Nofumadores, porteuse du plan visant à parvenir à une génération sans tabac espagnole, qui consiste à prendre des mesures telles que la réduction du nombre de points de vente, l’augmentation de plus de 100 % du prix actuel du tabac et l’interdiction de l’accès des mineurs aux cigarettes et autres produits à base de nicotine déplore l’initiative approuvée par le Trésor public d’ouvrir de nouveaux points de vente.

•• Fin 2021, le gouvernement espagnol avait pourtant dévoilé un plan ambitieux et global contre le tabagisme qui introduisait, entre autres, l’interdiction de fumer sur les terrasses de restaurants, les plages et dans les voitures, une restriction de la publicité en ligne, l’interdiction des arômes, l’introduction du paquet neutre et une hausse des taxes (voir 13 décembre 2021).

Ces mesures concernent l’ensemble des produits du tabac et de la nicotine et sont censées couvrir la période 2021-2025. Les objectifs de ce plan sont de parvenir à une génération sans tabac dans le pays et de réduire d’un tiers la mortalité prématurée due aux maladies non transmissibles d’ici 2030. En Espagne, 20 % des citoyens de plus de 15 ans fument régulièrement.

•• L’augmentation du nombre de points de vente de tabac à proximité de la frontière française se traduit par un ratio de 50 buralistes pour 10 000 habitants, alors que dans le reste du pays, le pourcentage est de quatre points de vente pour 10 000 habitants. La multiplication des lieux de vente proposant des cigarettes à moitié prix par rapport à la France risque de nuire, du moins localement, aux nombreux efforts entrepris ces dernières années et qui ont fait leur preuve dans la réduction du nombre de fumeurs.

Une telle approche met à mal au moins partiellement les efforts déployés en France au cours de ces dernières années pour réduire l’accessibilité aux produits du tabac notamment chez les jeunes. Selon plusieurs études, une densité plus élevée de détaillants de tabac est associée à une plus grande consommation de tabac. La Nouvelle-Zélande, dans sa volonté d’End Game d’ici 2025 prévoit de réduire drastiquement les points de vente à travers le pays (jusqu’à 95 %).

Pour le Comité national contre le Tabagisme en France, cette situation souligne les enjeux d’une harmonisation vers le haut des taxes sur les produits du tabac, mais aussi la nécessité, conformément aux dispositions de lutte contre le commerce illicite des produits du tabac, de limiter les approvisionnements des pays en lien avec la consommation de tabac réelle de ceux-ci.