Boissons alcoolisées, cigarettes … Bercy, en quête de recettes, réfléchit à relever les prélèvements sur certains produits nocifs pour la santé. Analyse du Figaro (édition 5 août) signée Julie Ruiz que nous reproduisons ci-dessous.
Depuis son arrivée au pouvoir, la macronie a prouvé par la parole et par le geste son attachement aux politiques de baisses d’impôts (…) Un domaine échappe pourtant à cette doctrine politique : les taxes sur les produits nocifs pour la santé. La majorité n’hésite pas à augmenter la fiscalité quand c’est « pour le bien des consommateurs ». C’est toute l’idée de la fiscalité comportementale qui vise à user des taxes pour changer les habitudes de consommation.
•• Exemple : durant sa première campagne en 2017, Emmanuel Macron avait « promis » de porter le prix du paquet de cigarette à 10 euros. Une promesse non seulement tenue mais dépassée, puisque de 7 euros il y a six ans, le prix moyen du paquet (dont plus de 80 % sont constitués par les taxes) est passé à 11 euros, soit une hausse de près de 60 %. Et cette tendance risque fort de continuer (…)
À quelques semaines de la présentation du projet de loi de finances 2024, reste à savoir si la facture ne sera pas encore plus salée car, l’automne dernier, la première ministre jugeait qu’il serait « paradoxal » que la hausse des cigarettes soit moins élevée que l’inflation (4,5 % le mois dernier). Interrogé sur la question, Bercy refuse tout commentaire « à ce stade ».
•• Autre piste à l’étude, le gouvernement réfléchit actuellement à aligner la fiscalité des boissons alcoolisées sur l’inflation de l’année précédente et non plus sur deux ans auparavant.
La motivation affichée est la même que pour l’augmentation sur le tabac. L’idée est d’éviter que le prix relatif de biens nocifs pour la santé baisse. En l’état, pour l’année prochaine, cette mesure aurait un impact « de 0,3 centime par bouteille de vin » détaille le cabinet de Bruno Le Maire, et devrait ainsi plutôt toucher les alcools forts avec une ponction fiscale d’environ 1 euro à 2 euros. Cette « petite » augmentation rapporterait des centaines de millions à l’État. Sur les environ 5 milliards de recettes annuelles de taxes sur les boissons (incluant les boissons sucrées), une grande partie provient de la fiscalité sur les alcools.
Cette piste fait évidemment hurler les professionnels du secteur. Même les élus de la majorité de régions viticoles ont écrit au gouvernement le mois dernier pour s’opposer à cette augmentation. Parmi ces députés figure le très bordelais Thomas Cazenave. Lequel, devenu ministre des Comptes publics entre-temps, doit désormais mettre de l’eau dans son vin. Même s’il a affirmé jeudi ne pas avoir « changé d’avis », il a sobrement indiqué que « les discussions continuent avec le ministère de la Santé ». L’affaire devrait être tranchée à la rentrée (voir 6 août).
•• Au-delà des mesures déjà sur le râtelier des arbitrages budgétaires, des voix s’élèvent pour suggérer d’autres taxes « bonnes pour la santé ».
Ces derniers jours, le Conseil des prélèvements obligatoires – associé à la Cour des comptes – recommandait de renforcer l’actuelle « taxe soda », y compris en élargissant le périmètre des boissons concernées aux breuvages à base de soja ou encore aux sirops.