Les règles ont changé aux frontières entre la France et d’autres pays européens, où, en application du droit européen, un nouveau seuil de cartouches de cigarettes est désormais accepté par les Douanes françaises (voir 29 mars).
C’est ainsi que La Dépêche du Midi introduit une interview de Thomas Cazenave, ministre chargé des Comptes publics : celui-ci explique le nouveau cadre réglementaire, défend son combat contre la contrebande de tabac et réitère son soutien aux buralistes.
•• Les cigarettes ramenées de l’étranger sont-elles désormais en « open bar » ?
Thomas Cazenave : C’est tout le contraire. On s’est adapté à la décision du Conseil d’État en renforçant les prérogatives de la Douane. En travaillant avec elle et la Confédération des buralistes, nous avons décidé de changer complètement de logique : pour bien contrôler, bien stopper, bien sanctionner, mieux vaut s’appuyer sur un certain nombre de critères. Donc, à présent, lorsqu’une personne est contrôlée, c’est sur la base de 12 critères que les douaniers peuvent définir si elle fait ou non du commerce de tabac.
•• Par exemple ?
Thomas Cazenave : Si la Douane contrôle un véhicule et trouve une cartouche avec le nom d’un destinataire inscrit dessus, cela tombe sous le coup du décret, ce qui n’était pas le cas dans la précédente réglementation.
Si la Douane trouve du tabac en vrac, dissimulé, il y a aussi un soupçon de trafic et la possibilité de sanctionner. Ou s’il y a deux sortes de tabac différentes, alors que généralement on ne consomme qu’une seule marque. Le volume reste bien évidemment aussi un indice de trafic (voir 9 avril).
•• Comment faites-vous la guerre aux trafiquants de tabac ?
Thomas Cazenave : Je vous donnerais l’exemple de l’opération « Colbert 2 », que nous venons de mener. Une opération historique, puisque nous avons collecté, en 7 jours, 27 tonnes de tabac, en mobilisant 10 000 agents, dont 5 000 douaniers (voir 30 mars). Des opérations coup de poing comme celle-là, nous allons continuer d’en faire. La lutte contre la contrebande de tabac, c’est ma priorité.
•• Les buralistes frontaliers jugent que les prix du tabac sont trop élevés par rapport à ceux des autres pays européens …
Thomas Cazenave : Quand j’ai pris mes fonctions, je me suis engagé à ce que l’évolution des prix du tabac soit limitée à l’inflation. C’est donc une évolution progressive, pendant qu’en parallèle de nouveaux outils pour lutter contre les trafics montent en puissance, avec la Loi Douanes et le plan de lutte contre les fraudes. J’ai eu des demandes de plusieurs parlementaires pour augmenter considérablement le prix du tabac, et je m’y suis toujours opposé, pour éviter de nourrir l’économie parallèle.
Il reste toutefois des écarts de fiscalité entre les pays aux frontières espagnole, belge, luxembourgeoise, etc. Nous avons écrit la semaine dernière, avec le ministre de l’Économie Bruno Le Maire, aux deux commissaires européens en charge de ce sujet. Nous souhaitons que la Commission européenne réouvre et examine la Directive de 2011, pour aller vers une harmonisation de la fiscalité du tabac en Europe. C’est l’une des actions du plan national de lutte contre le tabac et je souhaite que cela fasse partie de nos thèmes de campagne pour les élections de juin.
•• Les buralistes considèrent qu’augmenter le prix du tabac ne fait pas baisser la consommation …
Thomas Cazenave : En réalité, ce que l’on observe depuis de nombreuses années, c’est une baisse des volumes, y compris sur le marché parallèle. Les buralistes avec qui je discute beaucoup, constatent aussi cette évolution. Et c’est pour ça qu’ils diversifient leurs activités. Ce sont des commerçants d’utilité publique, parfois le dernier commerce restant dans les villages. Nous les accompagnons, grâce à un fonds d’aide à la Transformation. Sur la période 2023-2027, nous y consacrerons 300 millions d’euros.