L’Afrique est terre de prédilection pour une quantité d’ONG « anti-tabac » dont les intentions, forcément louables, le disputent à une recherche effrénée de subventions auprès de l’OMS ou directement des États, quand ce n’est pas à la mise sur orbite de futurs ministres de la santé…
Il en ressort un activisme pouvant conduire à quelque erreur de communication.
Ainsi du Sénégal, où la loi anti-tabac votée en 2014 – prévoyant l’interdiction de publicité et de vente à 200 mètres des établissements scolaires (voir Lmdt du 15 mars 2014) – est restée lettre morte, faute de décret d’application. Pour relancer la pression, une ONG américaine (Campaign for tobacco-free kids) vient de lancer une campagne de communication dans la capitale, Dakar, pour le moins ambigüe.
Par affichage public (renforcé de spots radio/TV, d’insertions publicitaires dans les journaux et d’une campagne digitale), la campagne vante les mérites d’un bonbon de la marque « NicoTeen », avec pour slogan « Deviens accro ». Et donc, le bonbon « à consommer sans modération » présente un packaging totalement similaire à celui des cigarettes …
Tollé immédiat des autres associations de lutte contre le tabac concurrentes, ne goûtant guère la dérision comme mode de communication. Et tempête sur la toile. Par exemple, la Ligue sénégalaise contre le tabac a dénoncé cette « publicité qui ramène directement à la nicotine » et demandé le retrait immédiat de la campagne. Alors que le mouvement « No smoking revolution » juge sévèrement le concept qualifié de « maladroit » et lance une contre-offensive sur les réseaux sociaux.
Les créatifs de la campagne ont dû organiser une conférence de presse, ce jeudi 11 février, avec une laborieuse mise au point : « les bonbons Nicoteen n’existent pas et n’ont jamais existé. Nous voulions juste montrer les choses à parfaire, dans cette campagne. NicoTeen est un jeu de mots sur la nicotine et les teenagers. Nous avons tenté d’attirer l’attention des populations sur ces bonbons qui sont censés contenir plus de 7000 ingrédients. C’est dire, donc, qu’il faut absolument que nous protégions notre pays, le Sénégal, contre les nicotines ».
De fait, des jeunes, interrogés par la presse à la sortie des lycées, n’avaient pas l’air d’avoir saisi totalement le message : « ça à l’air d’être des paquets de cigarettes, mais on dirait que c’est des bonbons » ont-t-ils déclaré en substance. Confirmant une perplexité générale.
À moins que le plus grossier de cette campagne d’origine américaine réside dans une autre réalité des marchés africains : 8 cigarettes sur 10 n’y sont pas achetées en paquets … mais à l’unité.