Envisagée il y a quelques semaines par le gouvernement, la légalisation des casinos en ligne permettrait d’assécher l’offre illégale en France, selon les acteurs du jeu en ligne, mais leur aspect addictif pose problème, a prévenu la régulatrice du secteur lors d’un colloque ce 19 novembre.
C’est ainsi que débute une dépêche AFP, signée Séverine Rouby, que nous reproduisons.
•• Organisé par l’Association française des Jeux en Ligne (Afjel), qui vient d’être rejointe par le site Winamax, ce colloque était organisé dans un contexte budgétaire tendu pour ces acteurs qui redoutent de nouvelles taxes dans le projet de budget pour 2025 (voir 27 et 28 octobre).
La légalisation des casinos en ligne, serpent de mer du secteur, a resurgi à la faveur d’un amendement du Gouvernement au Projet de Loi de Finances (PLF), le secteur pouvant rapporter gros via la taxation. Mais il a été retiré face à la levée de boucliers des casinos physiques, soutenus par les maires, et des associations anti-addiction.
« Il y a plusieurs doctrines possibles et plusieurs façons de réguler ce secteur, soit en l’ouvrant totalement, soit en excluant certains jeux, comme les machines à sous, soit en l’adossant à des casinos terrestres », résume la députée LR de Haute-Savoie Virginie Duby-Muller, également à l’origine d’un amendement au PLF prévoyant la légalisation de ce secteur.
•• Revenant sur la concertation lancée début novembre par le ministre du Budget après le retrait de l’amendement, elle explique que « l’objectif était de mettre tout le monde autour de la table, de mieux préparer les choses et de prévoir des études d’impact sur l’ensemble du sujet » (voir 9 novembre). Des études réclamées également par Isabelle Falque-Pierrotin, la présidente de l’Autorité nationale des Jeux (ANJ).
« L’ouverture des casinos en ligne sur le marché français, ce n’est pas un ajustement à la marge. C’est aussi important, voire plus important, que l’ouverture de 2010 (lorsque les opérateurs de jeux en ligne ont été autorisés en France, ndlr) » et « les conséquences en termes d’équilibre concurrentiel seront considérables », estime la régulatrice.
« Un certain nombre d’acteurs internationaux à notre porte depuis quelques années frappent tout à coup véritablement à la porte. Il faut bien mesurer la capacité de résistance des acteurs français par rapport à cette nouvelle situation », prévient-elle.
En outre, les jeux de casinos en ligne (machine à sous, roulette…) sont « de loin les plus addictifs », a-t-elle rappelé. « Potentiellement, c’est un risque supplémentaire pour les consommateurs. On fait le constat que la population des joueurs addicts est trop importante : 1,4 million de joueurs problématiques, 400 000 joueurs excessifs. Si on rajoute une offre aussi addictive que celle-ci, ça pose un problème », prévient-elle.
•• Le président de l’Afjel Nicolas Béraud, également dirigeant de Betclic, défend quant à lui « le bon équilibre entre la protection des publics et une offre suffisamment attractive pour que les joueurs préfèrent aller sur des sites légaux ». « On l’a vu dans d’autres pays, quand une offre légale se fait connaître, les joueurs préfèrent aller sur le site et la marque qu’ils connaissent », fait-il valoir.
Autre invité, le régulateur danois Anders Dorph a plaidé en ce sens : « la prohibition ne marche pas. Ce qu’on essaie de faire c’est limiter les dégâts. Nous combattons toujours l’offre illégale mais essayons d’avoir une offre légale compétitive ».
Est-ce que l’ouverture du marché peut véritablement assécher l’offre illégale ? Prudente, Isabelle Falque-Pierrotin estime que « ça va certainement aider. Dans la plupart des pays l’offre illégale a diminué, pas immédiatement, plutôt au bout de cinq ans, mais dans certains cas elle a continué à augmenter donc le bénéfice sur l’offre illégale n’est pas aussi évident ».
Encore plus circonspect, Vincent Perrotin, directeur RSE de la FDJ, juge que « les opérateurs illégaux sont la plupart du temps situés dans des paradis fiscaux et ont très peu d’intérêt à jouer le jeu de la légalité, ce qui risque de se passer c’est plutôt une superposition d’une offre légale à une offre illégale qui restera très importante ». « La priorité, c’est avant tout de renforcer les moyens de l’ANJ », selon lui.