Les grandes marques de cigarettes sont confrontées à la baisse des ventes du tabac. Leur modèle économique est ainsi fortement remis en cause et les perspectives de diversification, autour du vapotage, pourraient être freinées par de nouvelles réglementations …
Ainsi démarre une enquête de Challenges.fr sur « la difficile réinvention des industriels du tabac face à la baisse de la consommation » que nous reprenons.
Campagnes de santé publique, prix des paquets de cigarettes en hausse … En 2023 dans le monde, un adulte sur cinq fume, contre un sur trois à l’aube des années 2000.
•• Même si l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) estimait, mi-janvier, que l’objectif de baisse de 30 % de la consommation de tabac entre 2010 et 2025 ne sera pas atteint, elle est palpable pour l’industrie du tabac. En France, selon les Douanes, il s’est écoulé moins de 1,5 milliard de paquets l’an dernier, soit une baisse de plus de 8 % par rapport à 2022. Il s’en vendait encore plus de 2 milliards en 2018.
Ce sevrage, couplé à la hausse des taxes dans certains pays bouscule le modèle économique des industriels. Et les oblige à diversifier leurs activités grâce à des produits sans fumée (…) Rien qu’en France, qui compte 3 millions de vapoteurs, selon Xerfi, le marché de la vape a atteint 1,45 milliard d’euros en 2023 (+75 % en trois ans).
Chez Philip Morris International, les produits sans fumée, commercialisés depuis une dizaine d’années, représentent environ un tiers des 33,3 milliards d’euros de chiffre d’affaires enregistré en 2023 (+10,7 % / voir 14 mars 2024). D’ici 2035, les revenus du groupe BAT (seront en majorité issus des produits sans fumée. Et le vapotage, dont les revenus sont en hausse de 15,6 % en un an, représente déjà 12 % des 31,8 milliards d’euros de son chiffre d’affaires 2023 (voir 12 mars 2024).
Imperial Brands ne communique pas de date de bascule de son modèle d’affaires, ni la répartition de ses lignes de revenus. « Face à la baisse des volumes, nous devons contrôler nos coûts de façon serrée », tente d’abord d’éluder Sean Roberts, le directeur affaires publiques et juridiques d’Imperial Brands, auprès de Challenges. Avant de concéder jouer sur l’augmentation des prix et ces nouveaux produits. Mais « nous avons encore besoin des revenus du tabac à fumer pour mener notre transition vers ce changement de modèle », estime-t-il (voir 17 novembre 2023).
•• La menace réglementaire plane toutefois sur ces nouveaux modes de consommation, limitant ainsi le potentiel de ces relais de croissance. Si l’OMS réclame des « mesures urgentes » pour contrôler tous les types de cigarettes électroniques, celles à usage unique sont déjà dans le viseur de nombreux pays.
En France, une proposition de loi visant à les interdire a été votée au Parlement et attend d’être approuvée par la Commission européenne. Le Gouvernement espère la rendre effective d’ici la fin de l’été 2024 (cette vente est déjà interdite en Nouvelle-Calédonie pour des raisons environnementales, ndlr). Le Royaume-Uni s’apprête à suivre les traces françaises.
Dans ce contexte incertain, les cigarettiers surveillent aussi de près les débats sur la dépénalisation du cannabis. Un marché aujourd’hui illégal dans l’Hexagone, mais dynamique, qu’Imperial Brands ne manque pas de qualifier d’« éventualité ».