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11 Août 2022 | Profession
 

Stéphane Pallez, présidente directrice générale du Groupe FDJ, a accordé un entretien au journaliste Stéphane Feuillebois du Revenu (magazine financier), que nous reproduisons ci-dessous pour l‘essentiel.

•• Comment jugez-vous vos résultats semestriels ?

Globalement, ce sont de très bons résultats (voir 29 juillet) qui montrent que La Française des Jeux (FDJ) a renoué avec une trajectoire de croissance dynamique, en particulier sur la loterie. La rentabilité est aussi au rendez-vous, avec une nouvelle amélioration de la marge d’exploitation (Ebitda), en hausse de 18 %.

Toutefois, compte tenu d’une base de comparaison 2021 qui était faible et des incertitudes qui pèsent sur l’environnement économique au second semestre, nous ne révisons pas à ce stade nos perspectives 2022. 

Nous renforçons en revanche nos engagements RSE, notamment en matière de biodiversité, et annonçons un don de 200 000 euros à l’Office national des forêts (ONF) pour contribuer à la reconstitution des forêts détruites par les récents incendies. Enfin, comme notre modèle est rentable, nous continuons à investir pour accompagner le développement de nos activités, notamment dans les paiements et services avec deux acquisitions : Aleda (voir 8 juillet) et L’Addition (voir 29 juillet).

•• Quel l’intérêt pour vous de miser sur ce type d’activité ?

Ces deux opérations nous permettent d’accélérer notre développement dans ce secteur. Le rachat de L’Addition, un spécialiste des solutions de gestion, d’encaissement et de paiement à destination des cafés-hôtels-restaurants, va dans ce sens.

De même, nous avons finalisé l’acquisition d’Aleda, qui fournit ce type de solutions aux réseaux de buralistes et diffuseurs de presse. Notre objectif est de devenir le premier réseau d’encaissement et de paiement de proximité en France.

•• Un risque de récession est toujours possible en France. Faut-il croire ceux qui prétendent qu’en période de crise, les joueurs sont plus nombreux et/ou jouent des sommes plus importantes ?

Historiquement, ce n’est pas vrai. Sur les vingt-cinq dernières années, nous nous sommes aperçus que l’activité de La Française des Jeux demeurait acyclique. Et cela se vérifie dans les deux sens. Il n’y pas de forte accélération des ventes en période de croissance ni d’affaiblissement en cas de ralentissement économique.

FDJ est peu sensible à l’évolution de la conjoncture car les jeux représentent en réalité une faible part du budget loisirs des ménages. Dans l’hypothèse d’une forte récession, nous pensons que le segment des paris sportifs pourrait être davantage touché que la loterie, qui reste notre cœur d’activité. 

•• L’enquête de Bruxelles sur la soulte versée par FDJ pour le maintien sur 25 ans de ses droits exclusifs sur la loterie et sur les paris sportifs en point de vente fait peur à la Bourse (voir 27 avril). Quelle est la probabilité d’une décision défavorable selon vous ?

La Commission européenne a ouvert une enquête sur le montant de la soulte que devait payer FDJ à l’État pour sécuriser ses droits exclusifs pour une durée de vingt-cinq ans. Nous considérons que cette somme a été correctement calculée. À cette heure, nous n’avons pas d’éléments nouveaux sur une quelconque décision de la Commission. Nous travaillons étroitement avec l’État et espérons avoir des discussions avec la Commission à l’automne prochain (…)

•• Comment expliquer la baisse des mises dans le segment des paris sportifs au premier semestre 2022 ?

Il y a un effet de base qui concerne, en réalité, l’ensemble des acteurs du marché. L’an dernier, l’activité s’est en effet révélée très dynamique avec l’Euro de football. En 2022, le calendrier sportif est particulier car la Coupe du Monde de football au Qatar aura lieu en fin d’année. Le football représente le premier sport en termes de mises. Nous devrions retrouver une croissance plus soutenue dès le second semestre.

•• Assiste-t-on à des hausses significatives des mises pour les paris sportifs les années de coupe du Monde ou de championnat d’Europe de football ?

Absolument. D’une façon générale, le marché des paris sportifs progresse régulièrement chaque année et il franchit des paliers importants avec les grands évènements sportifs. Une fois un seuil franchi, l’activité et le nombre de joueurs ne baissent pas.

•• Vous vous êtes essayé au poker avec le groupe Barrière il y a plusieurs années sans succès. Pourriez-vous revenir vers cette activité ?

Aujourd’hui, il est évident que pour être un acteur de paris en ligne qui compte, il est nécessaire d’être multi-activités. Nous devrions donc bientôt pouvoir proposer une offre de poker en ligne.

•• Les prix augmentent avec l’inflation. Comptez-vous augmenter les tarifs de vos jeux ?

Non. Cela n’aurait pas de sens d’augmenter nos prix. Certes, nous subissons l’augmentation de certains coûts (énergie, transport, papier) mais les effets ne sont pas vraiment significatifs. Il n’y a pas de raison de répercuter cette augmentation sur nos joueurs. Les clients peuvent ajuster leur consommation de jeux en fonction de leur budget. Mais FDJ n’est pas affecté de manière significative par l’inflation.

•• Le loto virtuel va-t-il exister un jour notamment dans le métavers. Souhaitez-vous investir dans cet univers virtuel ?

Nous sommes très ouverts à l’innovation et donc très attentifs à ce nouveau marché car le métavers est un univers qui a des connexions naturelles avec celui des jeux. D’ailleurs, nous avons déjà acquis une parcelle dans le métavers The Sandbox afin d’explorer cet écosystème. Mais l’organisation de jeux d’argent dans cet univers poserait toutefois la question de sa régulation.

•• Quel est votre politique en matière de dividende ?

Nous avons réaffirmé, en février dernier, notre volonté de verser entre 80 % et 90 % de notre résultat net sous forme de dividende. Et comme notre modèle est en croissance rentable, FDJ devrait pouvoir augmenter le montant de son dividende dans les années à venir.

•• Quelle est votre avis sur l’évolution du titre FDJ qui a décroché après avoir atteint un plus haut historique le 25 juin 2021 à 51,70 euros ?

Il y a deux facteurs principaux qui semblent expliquer cette évolution mais je vous rappelle que, à fin juillet, le cours de FDJ a cru de plus de 70% depuis son introduction en Bourse. Pendant la pandémie mondiale, FDJ a été considérée comme une valeur «refuge».

Une fois passée cette période, le marché s’est naturellement tourné vers des actions qui avaient davantage souffert, ce qui explique le moindre intérêt pour une action qui avait atteint des records historiques. Au-delà de la dégradation récente de l’environnement boursier, le recul du titre s’est accentué avec la décision de la Commission européenne d’ouvrir une enquête ajoutant une incertitude supplémentaire.