Suite à la décision du Conseil d’État offrant désormais un cadre légal à la vente de fleurs et feuilles de chanvre présentant un taux de THC inférieur à 0,3 % (voir 29, 30 et 31 décembre 2022), la Mildeca (Mission interministérielle de Lutte contre les Drogues et les Conduites addictives, voir 2 janvier 2022) a publié une communication en 12 points développant la position gouvernementale. Nous la reprenons ci-dessous.
1• À la suite d’une décision de la Cour de justice de l’Union européenne dans l’affaire dite Kanavape, les autorités françaises ont révisé la réglementation applicable à la culture, à l’importation et à l’utilisation du chanvre par un arrêté du 30 décembre 2021.
2• Par décision du 29 décembre 2022, le Conseil d’État a annulé la disposition de l’arrêté visant à restreindre l’utilisation de la plante entière à la production d’extraits de chanvre et interdisant de ce fait la commercialisation de fleurs et de feuilles brutes, ainsi que celle prévoyant la conclusion d’un contrat entre producteur et acheteur.
3• Le Gouvernement prend acte de cette décision. Dès à présent sont engagés les travaux interministériels nécessaires pour compléter, à la lumière des considérations du Conseil d’Etat, les dispositions de l’arrêté du 30 décembre 2021 qui restent en vigueur.
4• Le Gouvernement réaffirme sa volonté de mettre en place un cadre réglementaire qui permette le développement sécurisé de nouvelles activités économiques liées au chanvre, tout en garantissant un haut niveau de protection des consommateurs et en préservant la politique ambitieuse de lutte contre les trafics de stupéfiants mise en œuvre depuis 2019.
5• Pour protéger la santé de la population française, le Gouvernement veille à encadrer très strictement toutes les dérogations à l’interdiction générale des stupéfiants qui sont aménagées en faveur de l’utilisation industrielle et commerciale des plantes de cannabis. En effet, le cannabis est classé stupéfiant aux niveaux international et national en raison des risques pour la santé, de plus en plus documentés, liés à son usage. Les dérogations ne peuvent être prévues que pour des usages présentant des risques limités et maîtrisés. Tel est le cas pour les produits alimentaires et cosmétiques incorporant des extraits de chanvre, dont ceux contenant du CBD, dès lors qu’ils sont strictement conformes à la réglementation communautaire qui leur est applicable.
6• Les produits alimentaires, dont la teneur en THC est telle que leur consommation crée un risque inacceptable pour la santé humaine, ne peuvent pas être mis sur le marché dans l’UE. Ces teneurs maximales de THC sont établies à partir d’une valeur toxicologique de référence déterminée par l’Autorité européenne de sécurité alimentaire (EFSA) et sont de ce fait très basses (bien inférieures au taux de 0,3 %). Par ailleurs, le CBD et les extraits de chanvre concentrés en CBD constituent, au sens de la réglementation communautaire, de nouveaux aliments. Leur commercialisation est donc subordonnée à une autorisation préalable par la Commission européenne, après évaluation de l’EFSA. À ce jour, plusieurs dossiers sont en cours d’évaluation mais l’autorité européenne a annoncé à l’été 2022 manquer pour l’instant des données scientifiques suffisantes qui lui permettraient de conclure dès à présent à la sûreté des produits.
7• Pour les produits cosmétiques, la réglementation communautaire encadre très strictement l’usage des extraits de chanvre, afin de protéger la santé des consommateurs. Ainsi, à ce jour, seul le CBD pur, sous forme d’isolat, est autorisé dans les produits cosmétiques.
8• Quant à la consommation par la voie fumée de fleurs et de feuilles brutes, elle présente des risques sanitaires avérés. En particulier, la combustion des substances organiques génère des éléments cancérigènes. C’est pourquoi l’arrêté du 30 décembre 2021 prévoyait une interdiction de commercialisation de ces produits. Prenant acte de l’annulation de ces dispositions, le Gouvernement poursuit sa réflexion afin de prévenir ces risques en élaborant un cadre réglementaire adapté pour la commercialisation de ces fleurs et feuilles brutes.
9• Les liquides de vapotage contenant du CBD produit de façon chimique ou obtenu par extraction des fleurs et feuilles de la plante de chanvre sont autorisés, sous réserve qu’importateurs et vendeurs se soient assurés que leurs fournisseurs se sont conformés aux obligations de déclaration au titre de la réglementation européenne (REACH).
10• Les produits issus du chanvre mis sur le marché doivent avoir une teneur en THC qui n’est pas supérieure à 0,3 %. À défaut, ils relèvent de la politique pénale de lutte contre les stupéfiants. Ces dispositions ne préjugent pas de dispositions plus strictes mentionnées supra, qui sont déterminées par des réglementations sectorielles pour les catégories de produits qui en relèvent, en particulier pour les denrées alimentaires et les produits pour les animaux, pour garantir leur absence de risque pour la santé humaine comme pour la santé animale.
11• Les produits contenant du CBD ne peuvent, sous peine de sanctions pénales, revendiquer des allégations thérapeutiques, à moins qu’ils n’aient été autorisés comme médicament à usage humain ou vétérinaire. En effet, les allégations thérapeutiques, hors médicament autorisés, sont purement spéculatives à ce stade et risquent de détourner les usagers d’une prise en charge éprouvée (arrêt du traitement médicamenteux au profit du CBD ou « automédication »).
12• Les publicités en faveur de produits contenant du CBD ne doivent pas entretenir de confusion ou faire l’amalgame avec une consommation de cannabis à usage dit récréatif et faire ainsi la promotion du cannabis. Cette pratique est susceptible de constituer l’infraction pénale de provocation à l’usage de stupéfiant. Cette confusion est d’autant plus préjudiciable que les risques liés à la consommation de cannabis sont de mieux en mieux documentés par les études scientifiques.