De fin juillet à début octobre, Dominique Dussart vit au rythme de la récolte du tabac. L’exploitant agricole, basé à Allouagne (10 kilomètres de Béthune), est le dernier du Pas-de-Calais à en cultiver. L’intégralité de sa production est destinée à la chicha, à l’export. La Voix du Nord a suivi la récolte en cours.
Dominique Dussart et deux ouvriers, assis au ras du sol, cueillent les grandes feuilles vertes – trois ou quatre par plant à chaque passage – et les déposent dans le bac devant eux.
•• Les bacs montent toutes les 30 à 90 secondes vers l’étage supérieur de la machine où l’on « fiche les feuilles sur les peignes ». Nous sommes précisément à Chocques, où le chef d’une exploitation de 49 hectares (blé, betteraves, pommes de terre), cultive 5,5 hectares de tabac blond de Virginie depuis 1983.
« Quand je me suis installé, il fallait trouver une production pour rentabiliser cette petite ferme », raconte-t-il. « Je suis allé voir des collègues qui faisaient du tabac brun à Allouagne et je me suis lancé. À l’époque, il y avait pas mal de tabaculteurs autour d’Aire-sur-la-Lys. Aujourd’hui, je suis le dernier du département et il en reste deux dans le Nord. »
L’intégralité de sa production, 15 à 20 tonnes par an en fonction de l’ensoleillement – « cette année, ça sera plutôt 15 car on a eu un début de printemps pourri » – est exportée en Italie puis vers le Moyen-Orient, où elle est consommée en chicha. « Plus un seul kilo de mon tabac n’est fumé : depuis le Covid, la chicha est le seul marché porteur. »
•• Bien avant ça, les plants sont semés sous serre début mars puis élevés dans des plateaux de polystyrène jusqu’à atteindre 12 centimètres. « On les repique dans le champ vers le 10 mai et 70 jours plus tard (vers le 20 juillet), ils mesurent 80 cm et on commence à cueillir. On fait six passages, en commençant par les feuilles les plus basses. » Les plus hautes ont encore deux mois pour mûrir. Début octobre, toutes les tiges seront dépouillées de leurs feuilles.
Chaque jour, les cueilleurs sont à pied d’œuvre dès 7 heures, « quand les feuilles sont fraîches. Elles ramollissent à mesure que la chaleur augmente ». Illustration en fin de matinée : « Regardez, ça colle déjà, à cause de la nicotine et du goudron. On se “talque” les mains avec de la terre pour pallier ça mais rien ne vaut les feuilles fraîches. » Midi, c’est fini pour aujourd’hui. Les 48 peignes du jour sont transportés à la ferme, où les attend le four pour le séchage. (Voir aussi 5 septembre 2024, 22 et 13 septembre 2023). Photo : La Voix du Nord