Marisol Touraine se tait. Elle se force à le faire, même. Mais il ne faut y voir que pure tactique. Pas question que le paquet neutre, qu’elle entend présenter comme mesure-phare de son projet de loi Santé (voir Lmdt du 25 septembre), fasse trop tôt l’objet de polémique publique. D’ailleurs, toutes les précautions sont bonnes à prendre.
Dans les échanges interministériels qui se tiennent, en ce moment même (voir Lmdt des 4, 6 et 7 février), il ressort que les amendements « tabac » seront d’origine gouvernementale et non parlementaire. Façon d’échapper plus aisément à la pression des « anti paquets neutres » (au premier chef, les buralistes). Même si le cabinet de Marisol Touraine a déjà préparé un argumentaire qu’elle estime imparable : « le paquet neutre est le seul moyen de détourner les jeunes du tabagisme ».
Mais, toujours lors de ces échanges discrets entre membres de cabinets ministériels, il semblerait que l’on bute sur deux points :
• le risque de nouveau bond en avant du marché parallèle. Aucun voisin terrestre de la France n’a, pour l’heure, annoncé cette mesure. De quoi aggraver ces distorsions concurrentielles qui font prospérer les achats frontaliers. Car malgré la stabilité du prix des cigarettes qui se confirme ce début d’année (voir Lmdt du 9 février), la différence de tarifs avec beaucoup de pays, voisins ou proches, reste encore substantielle ;
• le risque juridique de violation des droits des marques et de la propriété intellectuelle avec les conséquences financières que cela induit pour l’État. Il n’y a pas si longtemps, Le Figaro (voir Lmdt du 25 septembre) évoquait un recours des fabricants au Conseil d’État, dés la publication du décret, assorti de questions à la Cour de Justice européenne et au Conseil Constitutionnel. Le quotidien évoquait même la somme totale de 20 milliards d’euros d’indemnités d’expropriation. Du côté de Bercy, cela ne rend pas forcément serein.