Dans Le Parisien / Aujourd’hui en France de ce 21 avril, Michèle Rivasi (députée européenne Europe Écologie – Les Verts / deuxième de liste pour le scrutin du 26 mai) a publié une tribune que nous reproduisons (voir Lmdt du 29 janvier).
« Le thème de la campagne des européennes que veut imposer Emmanuel Macron entre « progressistes » et « populistes » est stérilisant. Ainsi, si on ne veut pas être taxé de populiste, on doit forcément être progressiste et il faut dès lors s’astreindre à ne pas critiquer l’Union européenne (UE) et son fonctionnement. Mais une campagne électorale, c’est le débat, pas une juxtaposition de discours béats !
•• « Nos concitoyens le sentent, l’UE ne fonctionne pas bien. Elle n’est ni démocratique ni transparente. Bruxelles cultive l’entre-soi, notamment entre gouvernements et hauts fonctionnaires. La Commission est aux mains des lobbys. Et le Parlement n’a pas les moyens de s’y opposer efficacement. Prenons l’exemple révélateur du tabac.
« Ainsi de la lutte contre les trafics de tabac qui se traduisent par près de 20 milliards d’euros de perte fiscale dans l’UE. Nous savons désormais que le commerce parallèle est composé à 98 % de cigarettes qui sortent des usines des cigarettiers. Pourtant, l’UE veut leur confier la mise en œuvre de la traçabilité, faisant des cigarettiers des contrôleurs contrôlés.
•• « Cette décision est non seulement ubuesque, mais contraire au droit international. Alors qu’Emmanuel Macron avait promis durant sa campagne « une vraie politique de prévention », son gouvernement a publié un décret le 9 mars allant dans le sens de « l’autocontrôle », preuve que le lobby du tabac est à l’œuvre. En ne mettant pas en place un organisme indépendant pour assurer la traçabilité des cigarettes, l’UE et le gouvernement français ne respectent pas la convention-cadre de l’Organisation mondiale de la santé pour la lutte antitabac qu’ils ont signée.
•• « Je saisirai, s’il le faut, la Cour de justice de l’Union européenne pour faire appliquer ce traité en force depuis le 25 septembre 2018. Ainsi du lobbying, la Commission refusant de publier ses rencontres avec l’industrie du tabac. J’exige la transparence totale pour les cigarettiers, mais également pour les lobbyistes externes et les cabinets d’avocats.
« Ainsi du financement de la vie politique, les cigarettiers étant encore autorisés à financer des campagnes électorales dans plusieurs États membres, malgré l’article 5.3 de la convention-cadre pour la lutte antitabac. Nous devons obtenir ce que la France applique déjà : l’interdiction dans l’UE de tout financement politique privé, industrie du tabac incluse.
•• « L’Union, pour restaurer la confiance, doit rééquilibrer son fonctionnement en revalorisant son Parlement, qui a besoin de pouvoirs nouveaux, de moyens de contrôle, d’enquête. Sur la Commission et sur les lobbys. C’est le sens que je veux donner à ce nouveau mandat. Ce combat pour une UE plus démocratique et participative va être long. Les parlementaires européens élus fin mai n’ont d’autre choix que de changer leur façon de travailler. À Bruxelles, le travail journalistique d’investigation reste insuffisant. Aux parlementaires de prendre des initiatives de transparence et de dénonciation des dérives Commission-lobbys : chaînes YouTube, sites Internet, pétitions.
•• « La Commission ne peut plus gouverner dans sa tour d’ivoire à l’insu des peuples européens. Si on ne veut pas donner plus de pouvoirs au Parlement, que les élus européens agissent. Je proposerai dès juin au nouveau Parlement européen un premier cas pratique, celui de la révision de la directive tabac. »