Suite au débat sur le thème « Repenser la fiscalité des nouveaux produits du tabac et de la nicotine pour lutter contre le tabagisme » – organisé le 28 septembre à Paris par l’Institut de Recherche et d’études sur la Fiscalité/ IREF (voir 26 et 22 septembre) – ce dernier a publié un communiqué de synthèse que nous reprenons.
Aujourd’hui en France, il y a encore plus de 11 millions de fumeurs, c’est-à-dire, 25 % de la population adulte. Malgré les contraintes de taxes et de prix imposées par l’État, les chiffres relatifs à la prévalence tabagique sont repartis à la hausse en 2020 selon le dernier rapport de Santé Publique France, publié en mai dernier (voir 26 mai 2021).
Toutefois, il existe aujourd’hui des alternatives à nocivité réduite à la cigarette, telles que la cigarette électronique et le tabac à chauffer, qui permettent de délivrer la nicotine en réduisant les émissions de substance novices du fait de l’absence de combustion.
C’est dans ce sens que l’IREF, a organisé une rencontre-débat autour la fiscalité comportementale des nouveaux produits du tabac et de la nicotine pour lutter contre le tabagisme, en présence de : Jean-Philippe Delsol, président de l’IREF ; Daniel Pryor, de l’Adam Smith Institute (think tank anglais) ; Patrick Coquart, chercheur à l’IREF et auteur du rapport présenté ; Emeric Christiansen, responsable des affaires fiscales chez Philip Morris France.
•• Les principaux enseignements du rapport « Repenser la fiscalité des nouveaux produits du tabac et de la nicotine pour lutter contre le tabagisme » :
• L’augmentation du prix du paquet de cigarettes, en France, de 212 % entre 2000 et 2020, n’a fait diminuer le nombre de fumeurs quotidiens que de 15 % ;
• La prévalence du tabagisme n’est pas toujours corrélée au prix, comme en attestent les exemples de la Suède et l’Italie :
. en Suède, la prévalence du tabagisme est d’environ 10 %, avec un taux qui baisse depuis les années 1980, grâce au développement du « Snus » (tabac oral), 5 fois moins taxé que la cigarette ;
. en Italie, la fiscalité est liée au niveau de nocivité des produits, de manière à appliquer des taxes moins élevées sur les produits moins nocifs que la cigarette; ainsi le tabac à chauffer et la cigarette électronique y sont aujourd’hui taxés entre 75 % et 95 % de moins que la cigarette.
• En France, la recommandation d’utilisation des alternatives à nocivité réduite se fait timidement, alors que celles-ci ont fait leurs preuves dans de nombreux pays dont des pays européens.
•• Patrick Coquart, à travers son rapport, invite les autorités publiques à prendre en compte les connaissances scientifiques, l’innovation des entreprises et les expériences étrangères pour adopter une politique de réduction des risques efficace et à l’écoute des besoins des fumeurs en France.
La prévalence tabagique au Royaume-Uni est deux fois moindre qu’en France. Ce pays a mis en œuvre une approche de santé publique qui intègre la réduction des risques, en recommandant aux fumeurs (pour ceux qui autrement continueraient de fumer) de passer à des alternatives à nocivité réduite. En termes de fiscalité, le Royaume-Uni vise à mettre en place une taxation des produits du tabac et de la nicotine basée sur le niveau de risque (concept de « risk-based-taxation »).
•• Afin d’apporter des solutions concrètes à ce sujet, en se basant sur les éléments-clés du rapport, l’IREF propose :
• Un fort travail de pédagogie sur la nocivité des produits du tabac et de l’alcool, à travers un « noci-score » – une échelle d’évaluation des produits – et d’adapter la taxation en fonction de la nocivité du produit. L’idée est que le consommateur puisse être éclairé dans ses choix par l’information qu’on lui donne et pas seulement par une taxe, qui en elle-même ne véhicule aucun message;
• Afin que ce « noci-score » soit intégré et légitime, il faut l’asseoir sur une analyse scientifique et multidisciplinaire qui peut évoluer dans le temps, avec un renouvellement régulier des expertises. Cela donnera une assise à la fois en matière de santé publique, d’économie mais également en matière juridique.
La proportionnalité de la taxe par rapport à la personne ou à la matière est un principe fondamental du droit fiscal : appliquer une taxation sur la base du « noci-score » sera ainsi une solution réelle à cette problématique.