Face à l’interdiction annoncée de la commercialisation des fleurs (voir 25 et 26 mai 2021), les boutiques de CBD redoutent une dégringolade de leurs ventes et les petits agriculteurs dénoncent la création d’une « mafia du chanvre » non psychotrope, selon une dépêche AFP dont nous reprenons des extraits.
•• « Interdire les fleurs, c’est nous priver de 60 % de notre chiffre d’affaires » confie à l’AFP Jean-Baptiste Berrue, le co-fondateur de la marque « Le Chanvrier Français » implantée en plein Paris. Ses boutiques importent la majorité de leurs fleurs d’Italie et de Suisse, ce qui leur a jusqu’ici permis de contourner la réglementation française.
Il s’appuie sur la décision de la Cour de Justice européenne (voir 19 novembre 2020) qui a prié la France de revoir sa copie. Depuis les boutiques se multiplient et de nombreux agriculteurs se sont lancés en anticipant un changement réglementaire, ce qui a permis à Jean-Baptiste Berrue de proposer cinq variétés « Made in France ».
•• Cette dynamique des boutiques est toutefois menacée reprend l’AFP. Matignon souhaite réécrire la réglementation pour autoriser une production française de CBD, uniquement destinée à la fabrication de produits dérivés.
Si les huiles, aliments et autres cosmétiques au cannabidiol pourraient être commercialisés sous certaines conditions, les fleurs brutes à fumer ou en tisane seraient complètement interdites. Une restriction « justifiée par des motifs d’ordre public et de santé publique » selon les services du Premier ministre.
Les autorités invoquent la nocivité de la combustion souvent utilisée pour fumer les fleurs de ce cannabis non psychotrope, et refusent de plonger les policiers dans l’ambiguïté. Car en cas de contrôle, impossible de distinguer visuellement le cannabis riche en CBD de son jumeau stupéfiant, fortement dosé en THC.
•• Selon le Creusois Jouany Chatoux, l’interdiction de commercialiser des fleurs brutes annihile toute filière en circuit court et réduit leurs débouchés à la seule production de chanvre « pour l’extraction » de la molécule de CBD, réutilisée dans les produits dérivés.
« Sous couvert de santé publique, l’État crée un cartel contrôlé par les professionnels de l’extraction et les producteurs de chanvre industriel » déjà installés car ils exploitaient jusqu’ici la seule tige de la plante pour fournir le bâtiment, l’automobile ou le textile, enrage le porte-parole de l’Association française des producteurs de cannabinoïdes.
•• Une autre régulation aurait pu être retenue, regrette le Syndicat professionnel du chanvre (SPC). « On peut interdire l’usage de CBD dans l’espace public, cela simplifie le travail des forces de l’ordre. Toute personne qui fume dans la rue ou transporte un sachet non scellé avec des fleurs serait alors considéré comme consommateur de stupéfiant » argue son président Aurélien Delecroix.
Il rappelle également l’existence de « tests rapides » permettant de déterminer le taux de THC du cannabis « en une minute ». « On a vraiment l’impression d’être les victimes collatérales d’un arbitrage idéologique » ajoute-t-il. « Le gouvernement refuse de distinguer CBD et THC, car cela sert son discours de fermeté contre le trafic de drogues à un an de la présidentielle ».