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7 Mar 2019 | Profession
 

À l’occasion du débat sur la privatisation de la FDJ qui revient à l’Assemblée nationale (voir Lmdt du 21 février), Le Parisien / Aujourd’hui en France se fait le relais de l’initiative d’un député LREM, Christophe Blanchet (Calvados), souhaitant la mise en place d’une nouvelle sanction (7 500 euros d’amende) pour « les buralistes » vendant des jeux aux mineurs. 

Démarche surprenante – ou pas – de la part d’un parlementaire (ancien patron d’établissements de nuit à Caen et responsable local de l’Umih) qui n’a de cesse, par ailleurs, de vouloir appliquer aux points de vente de détaillants, vendeurs de jeux, le même statut que les casinos : à savoir, l’interdiction d’accès aux mineurs.

Nous reproduisons, ci-dessous, l’intégralité de l’article.

« En guise de « garde-fous » avant que l’État ne se retire du capital de l’entreprise de jeux d’argent, 71 parlementaires de la majorité veulent imposer des sanctions en cas de vente de produits à des mineurs. Mais ils ne sont pas soutenus par le gouvernement.

Ils se défendent de mener une « fronde ». Mais ils sont tout de même 71 députés de la majorité de la présidentielle à défendre des amendements sur la Française des jeux (FDJ). Alors qu’ils savent pourtant que le gouvernement ne les soutient pas. À la tête de 72 % de son capital, l’État souhaite privatiser l’entreprise via la loi Pacte.

•• Mais avant, ces élus veulent imposer par la loi un renforcement du contrôle de la vente aux mineurs de jeux de tirage et de grattage. Via, notamment, la mise en place d’une amende de 7500 euros pour les buralistes qui seraient pris en flagrant délit.

« Il faut être dissuasif comme on l’est pour la vente d’alcool ou de tabac. Avec une telle amende on responsabilise les commerçants », explique le député LREM du Calvados Christophe Blanchet, initiateur de la proposition.

•• Mais pourquoi ne sont-ils pas soutenus ? Certains parmi ces élus téméraires soupçonnent le gouvernement de ne pas vouloir imposer de nouvelles contraintes sur les jeux pour maximiser le prix de vente de la FDJ.

« Ils essaient de rendre la mariée plus belle pour pouvoir la vendre plus cher, c’est comme pour une voiture d’occasion qu’on va bien lustrer avant de s’en débarrasser », glisse une élue LREM, pourtant pas habituée à s’opposer au gouvernement. « La protection des mineurs n’a pas de prix », renchérit Cristophe Blanchet. Tandis que Richard Ramos, député MoDem du Loiret, cosignataires de la proposition et qui se dit « pleinement dans la majorité présidentielle », accuse « les services de Bercy de faire du lobbying dans un pur intérêt financier ».

Contacté, le ministère de l’Économie se défend de velléités financières. Rappelant que le texte, modifié par le Sénat, prévoit déjà qu’un commerçant « peut exiger du client une preuve de sa majorité », un conseiller de Bruno le Maire assure être « ouvert à la discussion » lors de la nouvelle lecture à l’Assemblée nationale.

•• Aujourd’hui, c’est à l’entreprise de jeux d’argent de contrôler elle-même si l’interdiction de vente aux mineurs est bien respectée. Contactée, la FDJ assure « avoir conscience du problème de la vente aux mineurs et œuvrer depuis longtemps, notamment en faisant de la pédagogie auprès des commerçants et des inspections de contrôle ». Chaque point de vente est censé être contrôlé au moins une fois tous les deux ans. Des garanties qui ne suffisent pas pour le député Richard Ramos. « Le pouvoir de sanctionner doit être à l’initiative de l’État, imaginez qu’on demande à Pernot-Ricard de surveiller la vente d’alcool à des mineurs, il serait juge et partie ! » s’insurge l’élu.

•• Le député LREM Christophe Blanchet a déposé pas moins de sept amendements fixant une amende, avec un montant dégressif de 15000 à 7500 euros. Un stratagème pour « ne pas avoir que deux minutes (ndlr : le temps accordé pour défendre un amendement) pour tenter de convaincre mes collègues », glisse l’élu.

•• La commission spéciale sur la loi Pacte va certainement les rejeter ce mercredi tard dans la soirée, mais le député les déposera à nouveau mercredi prochain lors de l’examen du texte en nouvelle lecture en séance. « J’ai bon espoir de les faire adopter car c’est du bon sens de vouloir protéger les mineurs et ce n’est pas un débat partisan », ajoute le député, qui dit avoir « de bons signes » venant de collègues d’autres groupes.

•• Christophe Blanchet soutient bien l’État dans sa volonté de privatiser la Française des jeux, mais « à condition d’y mettre des garde-fous ». Outre la vente aux mineurs, le député LREM souhaite aussi que les missions de la FDJ soient clairement inscrites dans la loi pour notamment empêcher, à l’avenir, la possibilité d’ouverture de casinos ou de machines à sous en ligne.

Des « garde-fous » que l’ancien secrétaire d’État au Budget Christian Eckert, assimile plutôt à des « cache-misères ». Opposé à la privatisation de la FDJ, il raconte avoir obtenu gain de cause en 2015 sur ce sujet contre Emmanuel Macron, lorsque ce dernier était ministre de l’Économie. Et de s’agacer : « Le renforcement des sanctions sur la vente aux mineurs ne serait qu’un rideau de fumée avant de privatiser. »