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16 Mai 2015 | Observatoire
 

Logo Le Monde« Fumer c’est moche » titre Le Monde, daté du samedi 16 mai, sur une pleine page de son cahier  » Culture et Idées « . En fait, comme l’annonce le « chapô » du papier, il s’agit d’une réflexion sur les photos-choc. Tiens, tiens … comme si le sujet commençait à faire débat. En tout cas, voilà le chapô : « Pour tenter de réduire l’attrait de la cigarette, les autorités sanitaires ont voulu effrayer les consommateurs en imprimant des visuels chocs sur les paquets. Peine perdue ? »

En fait, la réflexion tourne autour des commentaires engagés – forcément engagés – de la seule spécialiste s’exprimant dans les médias en faveur des photos-choc. L’incontournable Karine Gallopel-Morvan, chercheuse en marketing social à l’Ecole des hautes études en santé publique … et aussi membre des instances du CNCT (voir Lmdt des 18 juin 2014 et du 14 avril 2015).

Et des réflexions, plus pondérées, d’un éminent connaisseur du rôle de la photo dans notre environnement contemporain : Christan Caujolle, ancien directeur de la photographie à Libération et essayiste. L’essentiel du débat.

• Credo initial, rabâché et laborieux de Karine Gallopel-Morvan : « une majorité d’études montre très clairement la prédominance du format visuel par rapport au format textuel. Concernant les images les plus efficaces, cela va dépendre du sexe, de l’âge, etc, et des individus ».

Paquets moches• Analyse prudente, au départ, de Christian Caujolle (pour l’anecdote, il collectionne ces « paquets de cigarettes violents, horribles ou ridicules ») : « l’impact de ces images dépend de la culture dans laquelle elles s’intègrent, et du degré de crédulité du public auxquelles elles s’adressent ».
Concernant le caractère outrancier de certaines illustrations : « ces images sont extrêmes, mais elles finissent par être aussi efficaces que peut l’être un film d’horreur. Non seulement, cette surenchère révèle l’inefficacité de ces images, mais elle approche de la caricature. L’effet qui en résulte est plus de l’ordre de la plaisanterie que du dégoût ou de la dissuasion ». C’est dit.

• Et là-dessus, concession … de Karine Gallopel-Morvan : « les messages comportant des images violentes peuvent paraître exagérés : des études montrent qu’elles ne sont pas toujours considérées comme crédibles ». Ah bon ?
Mais Karine revient vite au galop : « les images montrant des personnes réelles sont celles qui sont les plus efficaces ».

• Sur le paquet neutre, Christian Caujolle se montre nuancé : « le paquet neutre est peut- être plus efficace, car on prive l’objet de son pouvoir de séduction ». Avant de relativiser : « Une image renvoie à une abstraction. Pourquoi aurait- elle une influence directe sur un comportement ? Une image ne peut pas avoir un impact direct sur le réel : être confronté à la maladie c’est réel. Ces images, elles, restent abstraites». C’est redit.

• Et l’auteur de l’article (Gabriel Coutagne) de conclure de la façon suivante : « Sans compter que rien n’empêchera les fumeurs d’adopter toutes sortes de conduite d’évitement, depuis l’étui à cigarettes jusqu’au simple geste de retourner le paquet face contre table, s’ils désirent se libérer des représentations du mal ». Sauf que ce pauvre journaliste ignore encore que le paquet neutre de Marisol Touraine aura des photos d’horreur sur les deux faces.