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21 Mai 2016 | Observatoire
 

ContrepointsGuy Dartiailh est professeur de sciences économiques et sociales dans les collèges et, entre deux copies, prête sa plume à l’analyse des décisions politiques. Dans un billet publié sur le site « Contrepoints », ce jeudi 19 mai, il s’étonne que la politique de réduction des risques et des dommages (RDRD), désormais inscrite dans la Loi Santé de Marisol Touraine, ne soit pas appliquée à la lutte anti-tabac.

« En matière d’addiction, les stratégies visant uniquement la non consommation ont fait preuve d’une efficacité très partielle. Il est aujourd’hui impératif d’aller vers les personnes et mettre à leur disposition de nouveaux outils leur permettant d’agir par elles-mêmes. Une solution trop rarement prisée par le Gouvernement français. Preuve en est avec le tabagisme.

« Alors que la politique française de lutte contre le tabagisme semble se diriger vers la répression et la stigmatisation des fumeurs, la prévention et la réduction des risques ne sont presque jamais évoquées par les instances dirigeantes du pays. Après l’instauration du paquet neutre, la ministre de la Santé, Marisol Touraine, a annoncé vouloir augmenter le prix des paquets de cigarettes. Une mesure punitive qui ne tient compte ni de la réalité des usagers, qui iront se fournir à l’étranger et développeront ainsi le marché parallèle, ni de la réalité scientifique qui offre aujourd’hui des perspectives nouvelles de lutte contre les conséquences du tabagisme dans la société.

« Or, dans son « Rapport d’orientation et recommandations de la commission d’audition », diffusé en avril, la Fédération française d’Addictologie (FFA) plaide pour une nouvelle stratégie en faveur de la réduction des risques et des dommages et, en ce sens, rappelle qu’il est « admis que la toxicité de la cigarette est due exclusivement aux produits de la combustion ». En d’autres termes, alors que les politiques nationales de lutte contre le tabac se focalisent sur l’arrêt pur et simple de la cigarette, la FFA rappelle que lorsque la nicotine est disponible sans combustion, la toxicité est très largement diminuée. Voilà une piste de réflexion intéressante et pourtant peu développée par le Gouvernement. On en viendrait presque à se demander si ce dernier souhaite réellement améliorer la santé des fumeurs …

« La médicalisation excessive et la stigmatisation des personnes dépendantes ne peuvent en effet pas résoudre les problèmes de santé publique liés à la consommation de tabac. Comme l’affirme la FFA, les politiques de réduction des risques et des dommages constituent « une réponse novatrice adaptée aux besoins d’accompagner et de soigner. Elles s’intéressent à l’évolution permanente des usages de substances et comportements addictifs ».

 « La pénalisation, la persécution et les mesures autoritaires ont suffisamment montré leurs limites. Seule une approche prenant en considération la complexité et la diversité des personnes peut apporter des solutions réellement efficaces et humaines dans la lutte contre les addictions ».