
Alors qu’un procès concernant une affaire de trafic de cigarettes devait, en principe, se tenir ce début de semaine au tribunal correctionnel de Grenoble, Daniel Bruquel – partie civile et chef du Service Prévention du Commerce illicite chez Philip Morris France (voir 16 août) – revient sur l’état de la contrebande de tabac dans la capitale du Dauphiné.
C’est ainsi que débute un sujet – révélateur – de France 3 Auvergne Rhône-Alpes que nous reprenons.
Ce 16 octobre, les gendarmes isérois mettent au jour un vaste trafic impliquant un père et son fils qui auraient revendu massivement des cigarettes importées de Turquie dans leur épicerie de nuit à Échirolles.
Quelque 2 700 cartouches et plus de 24 000 euros sont alors saisis par les enquêteurs. Les deux hommes sont jugés ce 20 octobre en comparution immédiate au tribunal correctionnel de Grenoble pour ce trafic de cigarettes.
Pour la partie civile, Philip Morris France, cette affaire n’est que le reflet de l’essor de la contrebande de tabac dans les Alpes du Nord. « La région est particulièrement touchée par ce phénomène », insiste Daniel Bruquel.
Selon une étude commandée par l’industriel, au premier semestre 2025, 54 % des cigarettes consommées à Grenoble ne proviennent pas du réseau des buralistes français.
Un chiffre qui a doublé en à peine six ans. D’après Philip Morris, cette hausse est directement liée à l’augmentation du prix des cigarettes. « L’État se trompe dans sa politique de réduction de la consommation du tabac. En augmentant les taxes sur ces produits, il génère seulement plus de trafic car les consommateurs ne peuvent pas suivre l’augmentation des prix », assure Daniel Bruquel.
Pour le groupe, au lieu d’augmenter les prix, voire d’interdire certains produits comme les sachets de nicotine, il faudrait davantage réglementer pour permettre au réseau de vente de tabac légal de conserver le monopole au détriment du marché noir.
« Ces réseaux parallèles ont désormais accès à tout type de canaux de distribution, que ce soit dans les épiceries, les bars associatifs, dans la rue ou même sur les réseaux sociaux », pointe du doigt Daniel Bruquel.
Aujourd’hui, l’importation en contrebande, la détention et la vente des produits du tabac est passible de trois ans d’emprisonnement. Une peine trop faible pour l’entreprise qui aimerait voir ce quantum se rapprocher de celui de dix ans, comme pour le trafic de stupéfiants.
« Avec le trafic illégal, on perd sur tous les tableaux. Les messages de prévention pour la santé ne passent pas, l’État perd des recettes fiscales et surtout, on crée une nouvelle délinquance qui fait vite le choix quand il est tout aussi rentable de vendre des cigarettes que des stupéfiants pour un risque pénal largement inférieur », reprend le représentant de Philip Morris.
Les chiffres avancés par le fabricant de tabac sont tout de même à prendre avec des pincettes, reprend le quotidien régional.
En 2024, l’association Alliance contre le Tabac avait contesté un rapport commandé par Philip Morris indiquant qu’environ la moitié des cigarettes consommées en France ne provenaient pas du réseau légal.
Pour cette fédération d’associations de lutte contre le tabac, « ce chiffre, qui ne repose sur aucune méthodologie scientifique, ne vise qu’un objectif : freiner les politiques de santé publique en affirmant que la hausse de la fiscalité des produits du tabac entraînerait une explosion du marché noir. »
L’association rappelle au contraire que le prix du tabac est reconnu par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) comme « le levier le plus efficace pour réduire le tabagisme ».
Selon le dernier rapport des Douanes, les ventes de cigarettes reculent de 4,13 % en 2025 par rapport à l’année précédente.




