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17 Déc 2019 | Pression normative
 

Alors que nous en arrivons à la fin des discussions budgétaires, au Parlement, Guillaume Guichard – spécialiste « Fiscalité » au Figaro – revient sur l’exercice du « gage ». 

En clair : tout député ou sénateur a le pouvoir d’alourdir ou d’alléger la fiscalité, à condition d’équilibrer tout généreux geste fiscal par une contrepartie d’égale importance.

Or, au fil des décennies, les parlementaires se sont appliqués à desserrer cette contrainte et jouissent ainsi de la liberté fiscale sans avoir … à assumer la responsabilité budgétaire, selon son analyse publiée ce 16 décembre : il suffit de « gager sur la fiscalité tabac ».

•• « Les taxes tabac sont devenues le symbole de l’irresponsabilité parlementaire en la matière. Elles constituent en effet leur gage favori, car jugées « idéologiquement neutre » expliquait l’ancien président de la commission des finances Jean Arthuis dans un rapport. 

« Cette contrepartie n’est jamais appliquée.  Si c’était le cas, le paquet de cigarettes vaudrait plus cher qu’une boîte de caviar. Un sénateur a le droit, dans un seul amendement, d’augmenter de 50 % les droits tabac. Un député peut aller jusqu’à les doubler… 

•• « L’exercice du gage est d’autant plus formel que, séparation des pouvoirs oblige, le contrôle des gages est exercé par les chambres elles-mêmes, lors du dépôt des amendements.

Au Sénat, les équipes chargées de la validation ajoutent les gages manquants, détaille le haut fonctionnaire Pierre Chavy dans un article de « la Revue française de droit constitutionnel ». À l’Assemblée, le logiciel Eloi propose au député un choix de gages à l’aide d’un menu déroulant.

•• « Ensuite, lors de la discussion parlementaire, « seule est discutée la proposition de baisse des recettes, jamais sa contrepartie, comme la hausse des droits tabac » fait remarquer Alexandre Maitrot de la Motte, professeur de droit à l’université Paris-Est Créteil.

« Le gage est donc présenté pour rendre l’amendement recevable sur la forme, et non pas acceptable sur le fond. La contrepartie peut être levée, lors du vote, par le Gouvernement s’il approuve la mesure proposée par le parlementaire. Quand un gage sur les taxes tabac est toutefois adopté, ce qui est rare mais arrive parfois, il ne semble jamais appliqué. Rédigé de façon trop floue, il est impossible à retranscrire dans le code des impôts.

•• Inapplicables et donc virtuelles, ces dispositions devraient être considérées – en principe – comme anticonstitutionnelles dès leur dépôt, le Conseil constitutionnel précisant qu’une contrepartie à une baisse d’impôt proposée par amendement doit être « réelle ».