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3 Jan 2016 | International
 

Sevilla Université-Real FabricaElle aura accueilli de nombreux visiteurs jusqu’à son terme, avec les derniers jours de 2015, l’exposition organisée cet automne à Séville par les archives historiques de la province : « El tabaco del rey », un retour sur l’histoire de la Real Fábrica de Tabacos de Sevilla, à travers des archives toujours en possession d’Altadis (filiale d’Imperial Tobacco en Espagne).

Le succès de cette exposition, à la scénographie pourtant modeste, tient aux relations étroites entre l’histoire du tabac et Séville, où le tabac venant d’Amérique a commencé à être fumé en 1607. Il s’est agi alors très vite de satisfaire une demande qui s’est rapidement propagée dans toute l’Europe.

Une toute première fabrique, implantée dans le quartier de San Pedro en 1620 pour ne produire que du tabac à priser, laisse donc la place à un grand projet à la hauteur des ambitions du monopole royal.

En 1758, est inaugurée la Real Fábrica de Tabacos de Sevilla, soit cet imposant édifice partiellement fortifié, qui à l’époque n’était dépassé en dimensions que par le palais de l’Escorial, près de Madrid. Les touristes parcourant la capitale andalouse ne peuvent que le remarquer pour le contempler (ou le visiter) entre le palais des Montpensier de San-Telmo et le mythique hôtel Alphonse XIII.

Real FabricaJusqu’en 1942, on y aura stocké, traité, préparé et fabriqué tous les produits du tabac : tabac à priser, tabac à rouler, cigares et cigarettes (dès 1817).

Plusieurs milliers d’employés (jusqu’à 8 000, certaines années) y travaillaient et y vivaient quasiment en vase clos (ils habitaient dans les rues adjacentes), dans un univers se suffisant à lui-même de par son recrutement familial. L’usine disposait de son propre tribunal et d’une prison, le vol de tabac étant chose fréquente mais durement châtiée.

C’est ce que retraçait l’exposition à travers des documents savamment sélectionnés : édits royaux, plans, actes administratifs, fiches de tâches, etc. Évocateur mais pas fastidieux.

Cigarerra Real FabricaDe même, l’exposition nous menait sur les traces de Carmen. Car le recrutement féminin y est mis en pratique à partir de 1813. Les « cigarreras » sont plus douées que les hommes pour rouler cigares ou cigarettes et … leur rémunération est moindre. On les autorise à venir travailler avec leurs enfants et leur nombre (jusqu’ à 6 000) en fait une collectivité à fort caractère ayant une influence sur toute la vie sévillane.

Il n’en fallait pas plus pour que les cigarreras inspirent la nouvelle de Mérimée puis l’œuvre de Bizet et donnent à Carmen une image qui force les cœurs et le temps.

Cette notoriété, universelle et romantique, donnera aux cigarreras le poids suffisant pour menacer de se révolter, en 1885, devant la rumeur de la prochaine installation de machines à fabriquer les cigarettes.

La lettre officielle de démenti de la direction que l’on pouvait lire, parmi les photos et portraits de cigarreras, est un modèle dans le genre communiqué de com interne d’aujourd’hui.

Passionnant retour sur l’histoire. Le temps d’une exposition où Séville a retrouvé son âge d’or du tabac.