Un rapide passage en revue des dernières saisies de tabac, d’un bout à l’autre de l’Espagne, permet d’appréhender comment le phénomène prospère dans un pays stimulé par l’un des meilleurs taux de croissance de l’Union européenne et par une saison touristique record.
Mais la demande pour le tabac illégal y est toujours consistante. Et même si les prix y sont nettement inférieurs à ce que l’on connait en France, une fraction des fumeurs y estiment que le tabac est trop cher, et pas seulement les oubliés d’un redémarrage économique ne profitant pas à tous.
Et puis, l’offre y est bien organisée. Le tabac vient aussi bien d’Andorre que de Gibraltar (voir Lmdt du 25 mai) ou d’autres pays (voir Lmdt des 8 juillet et 20 juin). Des usines et ateliers clandestins se mettent en place (voir Lmdt des 8 août et 26 juillet).
Dernier phénomène : le trafic de feuilles de tabac que le client va préparer, couper et hacher lui-même pour en faire son propre tabac à rouler. Les Espagnols appellent cela le tabac « thermomix ».
•• Province de Cordoue, le 11 août : un contrôle de routine de la Guardia Civil, à Fuente Obejuna, permet la saisie, dans une camionnette, de quatre grandes caisses en cartons : à l’intérieur, 500 kilos de feuilles de tabac.
Les deux occupants de la camionnette ont oublié où ils allaient. Tout juste ont-ils laissé entendre que le tabac venait du Bangladesh.
•• Province de Cadix, le 18 août : la police fait une patrouille dans un quartier sensible de Los Barrios. Le conducteur d’un véhicule se montre brusquement un peu nerveux. Il avait 320 paquets de cigarettes à bord.
•• Frontière avec Andorre, le 20 août : la police catalane est alors complètement mobilisée sur la piste des auteurs ou complices des attaques de Barcelone et de Cambrils. C’est donc presque par hasard à la Farga de Moles – un point de sortie d’Andorre, côté espagnol – qu’une voiture immatriculée en France livre les 1 478 paquets de cigarettes qui y étaient cachés.
Le chauffeur espagnol n’était pas au courant.
•• En face de Gibraltar, le 21 août : lors d’une opération combinée entre la Guardia Civil et la Douane, il est observé que des individus jettent à la mer, à partir de la côte du Rocher, de grands sacs plastiques qu’un petit bateau vient prestement recueillir. Quand celui-ci accoste sur la côte espagnole en face, à La Línea de la Concepción, les agents saisissent 1 800 paquets de cigarettes, mis à l’abri de l’humidité dans leurs conditionnements plastiques.
Au même moment, dans le centre-ville de La Línea, deux motos se font arrêter avec un chargement suspect : et c’est encore près de 2 000 paquets qui sont découverts. Tous les suspects arrêtés ne semblaient pas en être à leur première opération.
•• Province de Séville, toujours la semaine dernière : à Bormujos (à une douzaine de kilomètres de la capitale andalouse) un nouvel atelier clandestin est découvert avec un stock de 280 kilos de feuilles de tabac et du matériel pour les transformer en cigarettes. 9 000 paquets vides de différentes marques sont trouvés aussi.
Un peu plus loin, à Utrera, les agents de la Guardia Civil arrêtent un véhicule roulant à vive allure : à bord, outre le chauffeur et son passager, habitants de La Línea de la Concepción, 9 040 paquets de différentes marques.
Ça n’arrête pas.