Il fut un temps où « le beau » s’invitait en toute chose, enchantant les plus menus objets du quotidien. Ainsi en est-il des tabatières qui, destinées à accueillir le tabac à priser, rivalisèrent au 18ème siècle de raffinement, attestant du bon goût et du statut de leur propriétaire.
En témoigne le bijou orfévré que les commissaires-priseurs montpelliérains Julie Le Brun et Jacques Farran s’apprêtent à dévoiler aux enchères le 26 mai à Castelnau-le-Lez : une tabatière en or émaillée portant le poinçon de Joseph-Étienne Blerzy, reçu maître en 1768.
•• À cette époque, la pratique de la prise du tabac connaît un large succès auprès de l’aristocratie qui sollicite les meilleurs orfèvres pour façonner un écrin propre à susciter l’admiration de leurs pairs. L’on raconte même que le Régent possédait une collection suffisamment conséquente pour arborer chaque jour une nouvelle tabatière.
« La fonction première de cet accessoire, très « prisé » de l’aristocratie de la fin du XVIIIe siècle, est de conserver le tabac mais aussi d’être admiré. C’est un véritable marqueur social », précisent Julie Le Brun et Jacques Farran dans Le Magazine des Enchères.
•• Parmi les orfèvres – qui se sont fait une spécialité dans la création de menus objets, tels que les tabatières, les boîtes à bonbons et à mouches, les nécessaires, étuis et bijoux – se distingue Joseph-Étienne Blerzy. « Il est considéré comme l’un des meilleurs orfèvres de son temps, ainsi qu’en témoigne sa présence dans l’Almanach Dauphin de 1776 qui répertorie les meilleurs artisans, artistes et commerçants du royaume », détaillent les commissaires-priseurs.
La tabatière en question livre un témoignage précieux de l’étendue de son talent. « Ce chef-d’œuvre de technique associe l’excellence de l’orfèvrerie, des émaux et de la joaillerie avec l’adjonction de perles fines délicatement serties. »
Fruit de la collaboration d’un orfèvre de renom et du meilleur miniaturiste de son temps (Adolphe Hall), l’œuvre a tous les atouts d’une commande royale. « Cette tabatière a probablement été offerte par Louis XVI », précise Jacques Farran. À noter qu’une tabatière de Blerzy comparable fait aujourd’hui la fierté du Louvre, figurant un portrait de Joseph II Empereur du Saint Empire.
« D’autres objets de vertu de Blerzy figurent dans les collections publiques, du musée des Arts décoratifs au musée Cognacq-Jay, au Metropolitan Museum de New York et au Victoria and Albert Museum de Londres », précise le commissaire-priseur qui annonce une estimation de 4 000 à 6 000 euros pour cette tabatière muséale. (Voir aussi 6 novembre 2022).