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14 Oct 2018 | International
 

Le Canada va devenir, ce mercredi 17 octobre, le deuxième pays au monde à légaliser le cannabis, mais cette mesure phare de Justin Trudeau risque de tourner au casse-tête pour plusieurs provinces, chargées d’organiser cette nouvelle industrie lucrative (voir Lmdt du 23 juin 2018).

À compter du 17 octobre, il sera donc permis aux Canadiens de cultiver, posséder et consommer à des fins récréatives, une première dans un pays occidental, cinq ans après l’Uruguay, pionnier en la matière (voir Lmdt du 21 mars 2014). Mais il convient d’y ajouter un certain nombre d’états américains, dont la Californie (voir Lmdt du 6 janvier 2018).

•• Les produits dérivés tels que la nourriture, les cosmétiques ou les e-liquides au cannabis ne seront pas autorisés avant 2019, même si des entrepreneurs canadiens ont déjà commencé à occuper ces nouveaux marchés.

•• Depuis l’élection de M. Trudeau, fin 2015, les marchés financiers s’affolent et les milliards pleuvent sur les producteurs canadiens de cannabis, indique l’AFP. Les trois plus grosses entreprises cotées à la Bourse de Toronto cumulent déjà plus de 30 milliards de dollars canadiens (19,9 milliards d’euros) de valorisation (voir Lmdt du 16 août 2018).

•• Selon certains, la légalisation devrait doper l’économie canadienne et générer de 816 millions à 1,1 milliard de dollars de nouveaux revenus au quatrième trimestre … sans compter le marché parallèle qui devrait encore représenter un quart des joints fumés au Canada, selon l’institut canadien de la Statistique.

Cela représente, selon les prévisions officielles, une manne de 400 millions de dollars de recettes fiscales pour la première année, à répartir entre les provinces (50 %), les municipalités (25 %) et le gouvernement fédéral (25 %).

En tout, Statistique Canada évalue que 5,4 millions de Canadiens achèteront du cannabis dans les boutiques autorisées en 2018, soit 15 % de la population. 4,9 millions en fument déjà.

•• L’expérience canadienne sera scrutée à l’étranger, avait observé en mai le Premier ministre Trudeau lors d’une interview à l’AFP. « Les alliés auxquels j’ai parlé sont intéressés de voir comment ça va se passer (…) avant de se lancer », a indiqué M. Trudeau, très attendu sur cette réforme à un an d’élections législatives incertaines.

« Si ça fonctionne bien, et je m’attends à ce que ça fonctionne bien, ça me surprendrait énormément qu’ils tardent beaucoup à étudier quel modèle pourrait fonctionner pour eux », avait déclaré le dirigeant libéral qui avait reconnu avoir déjà fumé « cinq ou six fois dans (s)a vie », y compris lorsqu’il était député d’opposition.

•• Dans les faits, les préparatifs se poursuivent en ordre dispersé dans plusieurs régions et agglomérations, tant cette réforme promise par le Parti libéral de M. Trudeau oblige les autorités locales et les entreprises à revoir leurs règlements et procédés.

Car si la fin de la prohibition du cannabis, en vigueur depuis 1923 au Canada, a été votée au printemps par le Parlement fédéral, la mise en oeuvre pratique de cette réforme revient aux dix provinces et trois territoires. Et plusieurs ont déjà annoncé leur volonté de ne pas appliquer totalement la loi canadienne.

Par exemple, même si la loi fédérale permet à chaque ménage de faire pousser jusqu’à quatre plants à domicile, les provinces du Manitoba (centre) et du Québec (est) ont prévenu qu’elles l’interdiront, quitte à devoir aller devant la Cour suprême pour avoir le dernier mot.

•• Comme pour l’alcool et le tabac, il revient aux provinces de décider de l’âge de la consommation de cannabis : 19 ans dans la plupart d’entre elles, 18 ans en Alberta et au Québec, où le nouveau gouvernement, qui entre en fonction au lendemain de la légalisation, veut relever ce seuil à 21 ans (il est déjà interdit de fumer aux moins de 18 ans dans la plupart des provinces.

•• Pour la commercialisation, certaines provinces, dont le Québec, vont en faire un monopole public. D’autres comme l’Ontario ou la Nouvelle-Écosse ont décidé de confier ce marché au secteur privé.

Ce casse-tête touche également les forces de l’ordre : la police fédérale va imposer une période d’abstinence de 28 jours à ses agents avant leur travail. Même chose pour la police de Toronto, première ville du pays, tandis que celle de Montréal, deuxième métropole canadienne, demande simplement à ses employés d’être « sobres » au travail.

/ Se pose également la question des lieux ouverts à la consommation : certaines municipalités, telles que Montréal, ont décidé d’imposer les mêmes règles que pour le tabac, mais d’autres ont décidé de seulement permettre de fumer son joint à domicile.