En scrollant sur l’appli de vidéos, Libération est tombé sur des tiktokeurs qui racontent leur métier avec passion ou humour. En deuxième épisode de cette série d’été (« Tif Taf Tok »), Keven, buraliste de 23 ans à Nancy (Meurthe-et-Moselle).
Une femme rentre dans un bureau de tabac. Un client attend son tour, mais la caisse est désespérément vide.
•• L’homme s’impatiente et décide de passer de l’autre côté du comptoir, sous le regard inquiet de la dame : « mais enfin, faites pas ça, y a une caméra, y en a même deux ! ». Détendu, l’homme attrape une demi-douzaine de paquets de cigarettes : « vous en voulez ? » Paniquée, elle s’enfuit. Il lui court après : c’était une caméra cachée, c’est bien lui, le propriétaire des lieux.
C’est bien lui, le tiktokeur qui se surnomme « Ton buraliste », suivi par 60 000 personnes, qui poste ce canular sur son compte et génère des centaines de milliers de vues depuis deux ans.
•• « Je suis au bureau de tabac de 6 heures à 20 heures non-stop, c’est compliqué de tenir, j’ai fait ça pour contrer l’ennui », résume le prothésiste dentaire de formation, qui travaille avec son père dans ce commerce de Nancy. « C’est un bureau de tabac familial, je veux que les gens en ressortent avec le sourire. »
Avec leur accord, Keven filme les clients, leur pose une question à laquelle ils ont dix secondes pour répondre, et les laisse se servir pendant dix autres secondes s’ils répondent juste. Aux dires de Libération, le regard émerveillé doublé des gestes affolés des acheteurs qui attrapent tout et n’importe quoi sont une petite pépite tiktokesque.
•• En parallèle des gags potaches, Keven se montre aussi pédago sur son métier dans des vidéos plus sérieuses. Qu’est-ce que le facing ? Une stratégie marketing pour bien mettre en avant les produits, notamment ceux sur le point de périmer. Ou encore la question que l’on se pose tous : qui gagne de l’argent sur un paquet de 11euros ? Pas le buraliste, qui touche seulement 90 centimes.
Tous les samedis depuis un an, le joyeux luron se filmait en direct devant des milliers de personnes pour piéger les clients (sauf les petits vieux qui parfois s’énervent). Jusqu’au jour où TikTok l’a interdit de live. La raison : la présence des paquets derrière lui, algorithme oblige. « TikTok est fermé sur le terme « cigarettes ». Parfois, on me reproche d’inciter les mineurs, mais je parle de la manière la plus générale possible. »
Depuis quelques mois, on lui demande des photos dans la rue, certains prennent même la route pour lui rendre visite. « On m’envoie souvent : je pensais que les buralistes étaient aigris, merci à toi », se réjouit Keven …