Ce jeudi 18 avril, l’émission « Envoyé Spécial » de France 2 diffusait en prime-time « Cigarettes : le trafic fait un tabac » (voir 18 avril 2024).
Au cœur de ce reportage de 29 minutes : des images chocs (saisies des Douanes, vente à la sauvette, interpellations musclées, etc.) pour illustrer l’affirmation selon laquelle 30 % des cigarettes fumées dans notre pays proviendraient du marché parallèle. C’est ainsi que débute une communication d’Alliance contre le Tabac (ACT / voir 5 septembre 2023) que nous reprenons.
Ce que le reportage ne précise pas c’est qu’à la source de cet argumentaire se trouvent des études commanditées par l’industrie du tabac ; notamment le rapport « Consommation de cigarettes illicites dans l’UE, au Royaume-Uni, en Norvège et en Suisse », l’outil de lobbying de Philip Morris International (PMI) commandé chaque année au cabinet de conseil KPMG et dont la méthodologie est largement décriée par le milieu académique.
Or si l’on se réfère aux travaux menés par les instances officielles (Santé Publique France, l’OFDT, Direction Générale des Douanes et des Droits Indirects) la part du commerce illicite ne représente que 6 % de la vente totale des cigarettes.
En brandissant la « menace sérieuse et croissante » du commerce illicite, les cigarettiers cherchent à discréditer la hausse de la fiscalité des produits du tabac, outil pourtant reconnu par l’OMS comme le plus efficace pour lutter contre le tabagisme et protéger les jeunes.
Autre argument avancé : le commerce illicite serait un manque à gagner pour les finances publiques. Or il est nécessaire de rappeler que le tabac coûte bien plus cher à l’État qu’il ne lui rapporte : si le gouvernement perçoit d’un côté 16 milliards d’euros de recettes fiscales, le coût social de cette industrie s’élève à 156 milliards d’euros par an (dont 26 milliards de prises en charge médicales). C’est-à-dire que chaque Français paye annuellement 2 300 euros pour supporter les dégâts causés par les cigarettiers.
En reprenant ce discours sans chercher à lui opposer des sources fiables et indépendantes, « Envoyé Spécial » reprend directement l’argumentaire de l’industrie du tabac pour freiner les politiques de santé publique.
L’ACT-Alliance contre le tabac déplore qu’une chaîne de service public fasse la part belle au discours trompeur de cette industrie. Afin de contrer l’influence du lobby du tabac, nous avons besoin du soutien et de la participation de tous les acteurs – et avant tout des médias – pour diffuser des informations claires et vérifiées auprès du grand public et ainsi, endiguer cette épidémie tabagique qui nous concerne tous.