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6 Avr 2021 | Observatoire
 

Dans une série d’interviews de LSA sur les pistes de relance de l’après-crise, Jacques Creyssel, délégué général de la FCD (Fédération du Commerce et de la Distribution), milite pour une vaste digitalisation des commerces, via une impulsion et des incitations (notamment financières) de la part des pouvoirs publics.

Les intérêts représentés par Jacques Creyssel (la grande distribution et son effet rouleau compresseur) sont loin de ceux du commerce de proximité. Mais son analyse sur l’avenir du commerce en général est intéressante. Extraits.

LSA : Comment le commerce, très chahuté aujourd’hui, doit-il préparer sa relance?

•• Jacques Creyssel : La relance du secteur du commerce doit faire l’objet d’une véritable stratégie gouvernementale. La réouverture de tous les commerces, que nous espérons rapide, devra nécessairement s’accompagner de mesures de « sortie de crise », pour éviter un bain de sang de l’appareil commercial français.

Mais il faudra aller au-delà du court terme. Le gouvernement doit envoyer un signal fort de confiance dans l’avenir du commerce, qui est le premier employeur privé en France, autrement dit s’en préoccuper comme on s’occupe de l’industrie (…) 

Cette stratégie gouvernementale que nous appelons de nos vœux devra mettre au premier plan le sujet de la digitalisation des commerces. La crise a en effet montré qu’il n’y aura pas d’avenir, pour beaucoup de commerçants, et ce quelle que soit leur taille, sans stratégie de développement omnicanal.

LSA : Il y a eu des aides dans ce sens, annoncées fin 2020 par Alain Griset…

•• J.C. : Le sujet n’est pas juste de créer un site internet mais bien de changer le modèle du commerce afin que les activités online et offline se complètent parfaitement. Aujourd’hui on peut voir, par exemple, des petits commerces travailler avec une tablette pour montrer leurs produits à leurs clients et pouvoir les vendre à distance.

Il faut réinventer le commerce, tout comme les restaurants se réinventent. C’est un changement profond qui doit s’opérer, et cela est valable pour les grandes surfaces alimentaires, qui se développent massivement dans ce domaine, comme pour les grandes surfaces spécialisées ou les petits commerçants. 

Cela suppose des investissements considérables qui vont se chiffrer en milliards d’euros, et donc des aides publiques extrêmement fortes pour encourager cette transformation, à un moment où les moyens d’investir sont au plus bas.

LSA : Concrètement, quelle forme cela pourrait prendre ?

•• J.C. : Nous sommes en train de travailler sur ces sujets. L’une des pistes serait de mettre en place des crédits d’impôts spécifiques à l’investissement omnicanal, s’imputant sur les impôts de production, notamment les taxes foncières. Cela permettrait d’atteindre deux objectifs en même temps : investir davantage et réduire l’écart de taxation avec nos concurrents pure players transnationaux.

Tout cela devra être fléché, lisible, pour encourager les investissements portant sur le numérique, mais aussi sur le développement des magasins eux-mêmes.

Pour que le magasin physique continue à être attractif et compétitif, il faut qu’il recrée du plaisir, de l’expérience client (…) Ce plan stratégique pour le commerce doit être une sorte de « New Deal » pour le secteur. Le premier plan de relance a mis 30 milliards d’euros sur la table pour l’industrie. Il faut que le deuxième plan de relance investisse au moins 10 milliards dans le commerce, si ce n’est plus, pour lui permettre de réaliser sa transition vers l’économie numérique. Toute crise doit constituer l’opportunité de se réinventer, en étant plus compétitif, plus numérisé et plus    écologique (…)

« L’investissement dans le digital est la clé de la capacité à conserver et à promouvoir un commerce physique. Si cela ne se fait pas, le risque c’est de ne plus avoir demain que quelques plateformes mondiales, avec des magasins au service de ces plateformes (…)