Autorisées en France depuis 1987, les machines à sous n’ont pas seulement sauvé les casinos, en grandes difficultés à l’époque. Elles sont devenues leur carte maîtresse, représentant plus de 80 % de leur activité, loin devant les jeux de table. Enquête du Figaro.
Aujourd’hui, on dénombre plus de 23 000 machines à sous en France … Dans des casinos uniquement (203 au total), en vertu de la loi. Ces machines à cash ont dégagé 2,2 milliards de produit brut des jeux (les mises, moins les gains), l’an passé. Une goutte d’eau comparée aux États-Unis et à l’Asie.
« Mais les casinos français génèrent la plus grosse activité de machines à sous d’Europe, grâce à un parc moderne, renouvelé en permanence », fait remarquer Romain Tranchant, président du Groupe Tranchant.
•• La plupart des autres pays européens ont plus de machines. L’Espagne, par exemple, en compte 300 000. Mais on les trouve surtout dans des bars. Elles sont souvent vieillissantes, non contrôlées et leur taux de redistribution aux joueurs bien moins attractif qu’en France. Dans l’Hexagone, ce taux de redistribution dépasse les 90 %.
Rien de mieux pour faire saliver les joueurs. Aucun autre jeu d’argent n’offre autant. Les casinotiers auraient pu se contenter d’un taux de retour de 85 %, le minimum imposé par la loi sur les machines à sous. Ils ont fait un calcul plus savant. Certes, en choisissant d’offrir plus aux joueurs, ils gagnent moins à chaque partie. Mais, sur le long terme, ils alimentent le succès de leur poule aux œufs d’or.
Cela contribue sans doute au fort pouvoir d’attraction qu’exercent les machines à sous, sur les jeunes comme les moins jeunes (la moyenne d’âge est de 42 ans), mais aussi toutes les catégories socioprofessionnelles.
•• La mécanique est très rodée de ces machines, orchestrée par des mastodontes, principalement américains. Light and Wonder, leader mondial, pèse à lui seul plus de 8 milliards de dollars à Wall Street. C’est lui qui se cache derrière le succès de « Dragon Train ». Ce nouveau jeu a été inauguré la semaine dernière au casino Tranchant de Cagnes-sur-Mer sur six machines à sous tout droit venues des États-Unis.
« Dragon Train » fait un carton à Las Vegas, depuis quelques mois. En plus d’une scénographie dernier cri, permettant au joueur de s’immerger dans l’univers du jeu, un système de bonus innovant pimente l’expérience. « Je suis constamment à la recherche de nouveautés dans le monde entier » déclare Marc Martin, directeur des jeux du groupe Tranchant (16 casinos en France). « Les sorties sont présentées sur les salons professionnels, dont les plus grands sont à Las Vegas, Macao, Londres et Barcelone demain. Il faut du feeling pour trouver les pépites. Pour Dragon Train, nous n’avons pas d’exclusivité, mais nous avons été les plus réactifs en France et en Europe ».
On est loin de l’image des trois cerises, trois citrons ou trois bananes alignées, et c’est gagné ! Les rouleaux mécaniques des bandits manchots des débuts ont laissé place à des machines bourrées de technologies, bien plus variées. Les nostalgiques peuvent encore tenter leur chance en activant des bras articulés. Mais il suffit aujourd’hui d’appuyer sur un bouton pour espérer gagner le gros lot. Les jetons ont quasiment disparu. Les pièces aussi, mais pas les billets.
De plus en plus, les joueurs ont droit à des cartes, qu’ils peuvent alimenter en argent dans les casinos. Et les premiers porte-monnaie électroniques apparaissent.
•• Le casino Barrière d’Enghien-les bains dispose à lui seul d’un parc de plus de 500 machines à sous. Insuffisant cependant pour fidéliser la clientèle et attirer de nouveaux joueurs. Reparti à l’offensive après le trou d’air du Covid, l’établissement ambitionne de porter à 600 appareils son parc machines à sous, d’ici à 2026.
Un investissement important, chaque machine coûtant entre 25 000 et 40 000 euros. Et parfois plus. La direction n’a pas seulement budgété ces dépenses. Dans un secteur très réglementé, elle a demandé l’autorisation au ministère de l’Intérieur avant de voir plus grand. Fonctionnement, installation, maintenance … Les casinotiers doivent systématiquement en référer à leur ministère de tutelle.
En tant que premier casino de France, le casino Barrière d’Enghien-les-Bains est la vitrine du secteur. « Nous sommes en quelque sorte un showroom pour les grands fabricants (en tête, les américains Light and Wonder et IGT, l’autrichien Novomatic et l’Australien Aristocrat), qui nous proposent leurs meilleurs produits, en exclusivité pendant quelques mois », déclare Jean-Charles Pitt, directeur général du casino Barrière d’Enghien-les-Bains.
Le succès de ces derniers mois, c’est le tout nouveau concept Frankenstein, fabriqué par l’américain Light and Wonder. « Nous avons installé ces machines au moment d’Halloween, dans le meilleur emplacement du casino, que nous appelons « la place du village », » poursuit le dirigeant. « Nous avons des machines qui s’adressent à tout type de joueurs : les gros comme les petits. Leur emplacement est décidé en fonction d’un « parcours client » qui évolue deux à trois fois par an. Ce qui lui saute aux yeux, c’est la nouveauté, et l’affichage des jackpots les plus élevés. »
•• « Depuis l’arrivée des machines vidéo dans les années 1990, l’offre n’a cessé de se moderniser, avec des écrans incurvés d’une excellente résolution », constate Jean-Charles Pitt. La mécanique de jeu s’est aussi diversifiée avec des machines de plus en plus ludiques, offrant des parties de bonus et une fréquence de jackpots plus importantes. « La plupart des fabricants possèdent leur propre studio de conception de jeux, en plus de faire appel à des indépendants », explique Olivier Maillet, directeur commercial chez Bally France, distributeur de Light and Wonder et Magic Dreams dans l’Hexagone, « tous cherchent à prolonger l’expérience client avec des modèles plus excitants, mais toujours faciles à comprendre, et une grande qualité graphique, sonore et lumineuse. » (Voir aussi 22 février et 31 janvier)