Contre-intuitivement – après des mois d’inflation galopante et d’alertes sur le pouvoir d’achat des Français – les commerces de proximité alimentaires voient toujours leurs résultats progresser : l’analyse du magazine Rayon Boissons.
« La proximité est un format qui connaît un engouement général et pas uniquement dans les grandes villes » précise Géraldine Sinopoli (Intermarché Express), « ces magasins sont dans l’air du temps ». Leurs performances méritent d’être soulignées face à des hypers et des supers toujours en perte de vitesse.
•• Alors pourquoi la proximité résiste-t-elle aussi bien en cette période plutôt morose pour la grande consommation alimentaire ? « C’est avant tout un effet d’offre » tranche l’expert grande conso Olivier Dauvers, « il y a eu une double modification du parc : en quantité et en qualité. »
D’une part, parce que les groupes intégrés comme Carrefour et Casino ont fortement travaillé sur le développement de leur réseau de franchisés, modèle quasi exclusif sur le circuit. Il leur permet en effet de limiter les investissements et de retirer des marges plus confortables qu’ailleurs grâce à la maîtrise des achats. D’autre part, parce qu’il est aujourd’hui plus difficile d’ouvrir des hypers et des supermarchés.
•• Malgré son impact prépondérant et incontestable, il serait néanmoins réducteur d’attribuer le succès de la proximité uniquement au développement de son parc. Quels sont les autres facteurs ?
•1• La rénovation des points de vente
Depuis plusieurs années, les enseignes ont en effet rénové leurs magasins en profondeur afin de changer l’image de leurs structures. Avec du mobilier plus épuré, de la technologie, mais aussi des parcours clients repensés faisant la part belle au frais, au snacking et aux services, toutes ont fait de réels efforts pour donner envie aux Français de venir faire leurs courses dans ces points de vente, au-delà du simple dépannage.
La chaîne Franprix entend transformer ses grandes unités (plus de 450 mètres carrés) en magasins de destination en renforçant l’assortiment de +20 %. L’enseigne urbaine du groupe Casino teste désormais « Oxygène » (photo) dans trois Franprix parisiens selon des profils différents (dépannage, complémentaire et référent).
« L’offre a été pensée par moments de consommation et enrichie de produits d’impulsion, d’innovations et des articles engagés pour être au plus près des attentes des urbains », décrypte Laurent Rapoport, directeur exécutif en charge de l’offre, du marketing et du digital de Franprix.
Ainsi, Casino et Carrefour annoncent également le déploiement de nouveaux concepts en 2025, afin de faire évoluer leur offre en lien avec la demande grandissante pour les energy drinks par exemple ou encore pour le snacking qu’il soit chaud ou froid.
•2• La démographie
Au rang des causes structurelles au succès du circuit de ces points de vente alimentaires de proximité, l’aspect démographique n’est pas à ignorer : telles que « le vieillissement de la population », avec des personnes âgées au fort pouvoir d’achat et particulièrement clientes de la proximité. Et « l’augmentation des foyers monoparentaux », plus habitués du réseau également.
•3• Le pouvoir d’achat
Et puis, il y a les raisons d’ordre plus conjoncturelles. « Les consommateurs ont tendance à limiter davantage leurs tickets de caisse durant leur plein de courses principal » révèle Nicolas Léger, analytic team director chez NielsenIQ. « Ils retournent ensuite en proximité à plusieurs reprises pour ajuster, car on se déplace moins loin pour un panier de complément. »
« Quand on est un commerce de proximité, on est le frigo du quartier. Ils viennent tous les jours ou presque » analysent plusieurs distributeurs qui constatent que leurs clients surveillent dorénavant leur budget comme le lait sur le feu.
Or, de manière générale, plus le magasin est petit, plus l’offre est courte et moins la tentation est grande. Ainsi, le manque de choix, point faible historique du réseau de proximité, s’avère être désormais une qualité aux yeux des plus soucieux !
•4• Le développement du télétravail …
Finalement, il ne faut pas oublier toutes les évolutions liées à la crise sanitaire et à la mise en place du télétravail pour de nombreux salariés français. En effet, d’après Kantar, 16 % des foyers ont au moins une personne en leur sein qui en bénéficie désormais. Cela génère donc une opportunité de vente supplémentaire à l’heure du déjeuner qui est davantage pris à domicile.
Reste à savoir si ces habitudes s’intégreront de manière pérenne dans le quotidien des Français …