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9 Juil 2020 | Trafic
 

Voici, l’essentiel des débats qui ont accompagné, hier, le vote des députés imposant de nouvelles limites au transport de tabac par les particuliers (voir 8 juillet).  Conformément à une demande de la Confédération (voir 1er juin).

•• Olivier Dussopt (ministre des Comptes publics) : Cet amendement s’inscrit dans la démarche du Gouvernement pour lutter contre la contrebande de tabac. Nous avons pris un certain nombre de mesures dans les textes financiers précédents mais nous vous proposons d’aller plus loin en réduisant les seuils de présomption de détention à des fins commerciales pour chaque catégorie de tabac manufacturé et donc je vous passe la liste des réductions et de diminution des seuils mais cela s’inscrit véritablement dans la lutte contre le trafic de tabac notamment les trafics frontaliers.

La période de confinement a mis en avant le fait que la consommation de tabac pouvait assez considérablement varier chez les buralistes français en fonction de l’ouverture ou de la fermeture des frontières. Nous allons donc un peu plus loin avec cet amendement.

Applaudissements dans l’hémicycle.

•• Éric Woerth (LR, Oise) : La commission des Finances a créé une mission sur la consommation de tabac pendant la crise. Je la présiderai, ce sera Joël Giraud qui sera le rapporteur général. Vous avez tous des buralistes chez vous, vous avez vu qu’en réalité ceux qui sont frontaliers ont connu une augmentation très forte de consommation, ceux qui sont à Paris aussi ; notamment parce que d’un côté les flux entre les frontières se sont évidemment considérablement réduits et puis le marché noir a lui aussi souffert.

C’est très intéressant de pouvoir in vivo savoir ce qu’est exactement la consommation réelle de tabac. Je pense que cette mission nous permettra de lier d’ailleurs fiscalité, consommation du tabac et au fond dommages collatéraux d’une fiscalité sur le tabac – je ne dis pas qu’il ne faut pas qu’il y ait une fiscalité élevée mais – dommages collatéraux qui est de repousser non pas la consommation mais de repousser le client et donc d’avoir des pertes fiscales très importantes

•• Charles de Courson (LT, Marne) : L’amendement est-il compatible avec la Directive 2008 ? Vous retenez le quart de ce qui est autorisé dans la Directive, dans son article 32. N’allez-vous pas en cas de recours vous faire annuler ? Une deuxième question concerne la détention.

Chez moi, un tiers de la consommation de tabac vient du Luxembourg et un peu de Belgique puisque l’on va là-bas et on fait le plein. On paye son plein par le différentiel et en plus le tabac. Mais on y va à plusieurs. Quand la douane arrête ses voitures chacun dit moi j’ai mes 8 blocs. La détention est-elle sur chacun des passagers ou vous allez raisonner sur la voiture ?

Je vous dit comment cela se passe chez moi et je ne suis qu’à un tiers alors qu’en bordure, par exemple en Haute-Garonne, ce n’est pas un tiers. On est à plus de 50%. Dans les Pyrénées-Atlantiques, plus personne ne va acheter ses cigarettes dans les tabacs français. À Hendaye, on traverse la frontière et là vous voyez pour ceux qui connaissent il n’y a que des bureaux de tabacs. Ils sont alignés les uns à côté des autres. Comment donc votre amendement va marcher ?

•• François-Michel Lambert (LT, Bouches du Rhône) : Un amendement que j’attendais depuis longtemps. J’avais notamment saisi le Président de la commission des Finances pour aborder ce sujet du commerce dit parallèle qui englobe le commerce de contrebande mais aussi ces retours d’achat dans les pays périphériques.

On a vu durant la crise que le mois d’avril c’était de mémoire entre 250 et 300 millions d’euros de recettes fiscales supplémentaires. Si on fait le calcul sur douze mois, on arrive quand même à environ 3 milliards d’euros de recettes qui échappent à nos finances. Nous avons une stratégie à mettre en œuvre. J’invite chacun à regarder, c’est un choc ! Vous y allez fort Monsieur le Ministre et je vous soutiens dans la réduction de ce qui est autorisé en termes d’achat. Pouvons-nous, au-delà de ces restrictions d’achats, commencer à entamer un dialogue avec les pays limitrophes de la France et avec l’Union Européenne afin de s’orienter vers une fiscalité beaucoup plus équilibrée sur le tabac ? Le risque sera encore sinon de contourner les nouvelles règles que nous mettons en œuvre.

Je rappelle que à chaque fois les cigarettes sont bien fumées en France, les conséquences sanitaires sont bien en France, elles sont supportées par le budget de la Sécurité sociale mais la fiscalité elle n’est pas en France. Nous l’avons vu, dans le cadre du confinement, que nous avions une grande partie de cette fiscalité qui nous échappe alors que c’est bien le budget de l’État, les français et les entreprises qui payent les conséquences dramatiques. Certains parlent de 100 milliards d’euros par an de la consommation du tabac. Il faudra aller beaucoup plus loin. Merci Monsieur le Ministre pour cet amendement.

•• Cendra Mottin (LREM, Isère) : Outre la grande avancée en termes de santé publique que la lutte contre le tabagisme représente et cet amendement qui réduit de 4 cartouches à 1 ce qui est possible de ramener d’un pays voisin, on peut saluer l’action du ministère de l’Action et des Comptes publics envers les buralistes en France. Depuis deux ans, ce ministère fait tout pour accompagner les buralistes qui perdent de l’activité parce que nous menons des politiques de santé publique ambitieuses contre le tabagisme. Depuis deux ans, le ministère est à leur côté pour leur donner de nouvelles activités.

On pourra prendre pour exemple ne serait-ce que la perception en monnaie des impôts qui est une avancée importante et qui leur ramène un trafic important. Je voudrais aussi saluer le rôle des douanes qui sur le trafic des cigarettes a encore en 2019 obtenu d’excellents résultats avec plus de 360 tonnes de cigarettes qui ont été saisies, ce qui représente 49% de plus que dans l’année 2018. Monsieur le Ministre, c’est pour nous l’occasion de saluer le travail des douanes et de votre ministère. Merci beaucoup.

•• Laurent Saint-Martin (rapporteur général de la Commission des Finances) : Entre temps, j’ai pu lire l’amendement et je le soutiendrai à titre personnel. Je veux juste noter qu’au-delà du soutien aux buralistes qui je crois est salutaire à travers cet amendement, c’est aussi un vrai enjeu de santé publique pour éviter le contournement de la hausse du prix du tabac sur notre territoire qui a un objectif de santé publique et pas seulement de finances publiques. Avis favorable à titre personnel.

•• Olivier Dussopt : Pour répondre aux interrogations exprimées :

• l’amendement ne modifie pas le mode d’appréciation de la quantité présente dans un véhicule. C’est donc une quantité par passager majeur puisque le tabac est interdit au moins de 18 ans.

• au niveau européen, nous savons que c’est une position offensive et même très offensive par rapport à la position européenne. Mais nous vivons également cette position offensive comme un moyen de faire vivre le débat que Monsieur Lambert appelle de ses vœux sur l’harmonisation de la fiscalité et des règles. Si un pays comme le nôtre, avec les flux frontaliers qui nourrissent parfois les trafics aussi importants que vous les avez décrits, ne prend pas l’initiative d’être sur une position offensive, le débat sur l’harmonisation n’arrivera pas.

Nous assumons cette position et nous la prenons pour cela. Cela participe à un objectif de santé publique qui est primordial, cela participe au soutien apporté aux buralistes et cela participe aussi à l’amélioration des comptes publics.