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27 Mar 2019 | Profession
 

Alors que les sénateurs se penchent, ce mercredi 27 mars, en commission, sur la seconde lecture de la loi Pacte, de nombreuses questions demeurent sur l’avenir la Française des Jeux (voir Lmdt du 21 février). 

Le Monde analyse les questions qui agitent le milieu des jeux. Car avant l’introduction en Bourse, il reste encore à définir quel sera, à l’avenir, le terrain de jeu de la FDJ, ainsi que son environnement réglementaire. Extraits.

(…) Les différents protagonistes du secteur des jeux, qu’ils s’agissent des casinos ou des entreprises de jeux en ligne, commencent sérieusement à s’inquiéter des intentions de l’État pour rendre la mariée FDJ la plus désirable possible.

•• Une source proche du milieu des casinos indique : « aujourd’hui, la FDJ dispose d’un monopole sur les jeux de grattage et les jeux de loterie. Or, la notion de jeux de loterie reçoit en droit français une définition extrêmement large qui peut inclure des activités assimilables aux machines à sous. La FDJ privatisée pourrait fournir des bornes avec accès à ces jeux de loterie au sein de son réseau physique. »

Cela pourrait concurrencer, à terme, les casinos et déstabiliser l’ensemble d’une filière qui représente quelque 60 000 emplois craignent les représentants des casinos.

« La FDJ n’est pas autorisée aujourd’hui à exploiter des machines à sous, et elle ne le sera pas demain », assure-t-on à Bercy, « c’est un débat assez conceptuel, et nous ne partageons pas cette interprétation. On aime se faire peur et à tout surinterpréter en France ! ».

Quant aux ordonnances (pour la mise en œuvre effective de la privatisation / ndlr), elles sont encore à l’arbitrage, précise-t-on au sein du Gouvernement.

•• À l’Assemblée nationale, Bruno Le Maire a promis de ne pas déstabiliser les autres filières de jeux, dont les casinos qui reversent chaque année quelque 1,3 milliard d’euros au budget de l’État, peu ou prou ce qui est attendu de la mise en Bourse de la FDJ.

« Nous entendons les déclarations d’intention du ministre. Mais, pour l’instant, rien n’est écrit dans la loi », indique Emmanuel de Rohan Chabot, de l’association française des sociétés de jeux en ligne, « comme Bercy tient la plume des ordonnances, et que c’est justement Bercy qui souhaite faciliter la privatisation de la FDJ, il existe quelques doutes. »

Au ministère de l’Économie, on précise cependant que « nous ne sommes pas les seuls à travailler sur ce texte. Et de nombreux ministères participent à son élaboration. »

•• Pour différencier l’offre de jeux d’argent de la FDJ de celle des casinos, le Gouvernement pourrait s’appuyer sur le « Taux de Retour aux Joueurs » (TRJ) des différents jeux.

« À la Française des jeux, un arrêté fixe le TRJ à un maximum de 75 % », rappelle-t-on au sein de la société. Or, pour une machine à sous, le TRJ est de 90 % à 95 %, car il faut que les joueurs gagnent souvent. « Pour l’instant, rien n’est écrit dans le projet de loi. Une fois que ce sera dans la loi, nous serons rassurés », reprend Romain Tranchant, du groupe familial Tranchant, qui représente l’association des casinos français. « Nous allons faire figurer certains engagements du Gouvernement directement dans la loi afin de rassurer l’ensemble des acteurs », confirme-t-on à Bercy.

•• Au-delà du périmètre d’intervention de la FDJ, d’autres dossiers mobilisent, dont la défense contre les addictions. « La libéralisation du secteur en Italie ou en Allemagne a eu des effets ravageurs pour le développement du jeu », assure une source. « Et aujourd’hui, ces deux pays sont en train de faire marche arrière pour réduire le nombre de machines à sous. Il faut donc d’importantes précautions. »

•• Concernant les mineurs, les députés ont réclamé, en vain, la création d’une amende pour sanctionner la vente ou l’offre de jeux d’argent et de hasard aux populations les plus vulnérables (voir Lmdt du 15 mars).

La FDJ dispose déjà d’un système interne de contrôle et de sanction, mais une fois privatisée, quel intérêt aurait-elle à le conserver ? De son côté, Bercy préfère temporiser avant de créer de nouvelles sanctions afin de ne pas braquer les buralistes.

•• Dernier sujet difficile, la création d’une autorité indépendante unique de supervision de l’ensemble des filières de jeux.

Le gouvernement a fait un petit pas dans ce sens. Alors que l’Autorité de Régulation des Jeux en Ligne (Arjel) ne supervise que les paris sportifs et le poker en ligne, la future autorité devrait contrôler à la fois la FDJ – elle pourra retirer des jeux de la circulation, par exemple –, les jeux en ligne, le PMU, ainsi que les casinos.

À une limite près : « elle n’aura autorité que sur les questions de prévention dans les casinos », précise Olga Givernet, députée LRM spécialiste de ce dossier. « Sur les questions de fraudes et de blanchiment d’argent, le ministère de l’intérieur restera en première ligne. »