Selon un rapport du Sénat intitulé « Pollution de l’air, le coût de l’inaction », publié ce mercredi 15 juillet, le coût annuel de la pollution de l’air s’élèverait « a minima » à 101,3 milliards d’euros par an, dépassant largement les 47 milliards (estimés) de coût sanitaire et social du tabac (soit deux fois plus).
La commission d’enquête sénatoriale, mise en place mi-mars et présidé par Jean-François Husson (Les Républicains, Meurthe-et-Moselle), avait pour mission d’estimer la charge financière globale de la mauvaise qualité de l’air. Une évaluation jamais établie jusqu’alors, qui intègre non seulement les dommages sanitaires de la pollution, mais également ses conséquences sur les bâtiments, les écosystèmes et l’agriculture.
« La pollution n’est pas qu’une aberration sanitaire, c’est aussi une aberration économique » conclut le rapport, voté à l’unanimité par ses 17 membres. Si les nombreux maux provoqués par les particules fines, l’ozone, le monoxyde de carbone et autres oxydes d’azote polluant l’air sont connus, le coût économique et financier qui leur est associé (soins, hospitalisation, versement d’indemnités journalières, pensions d’invalidité, absentéisme, perte de productivité…) est encore loin néanmoins d’être « suffisamment appréhendé par les pouvoirs publics et les entreprises ». Selon la commission, le seul coût économique de l’impact sanitaire est compris entre 68 et 97 milliards d’euros.
« Et encore, il reste sous-évalué », souligne la sénatrice EELV de Paris, Leila Aïchi, instigatrice et rapporteure de la commission. « Les études jusqu’alors menées comportent d’importantes limites. Elles reposent sur un nombre très restreint de polluants, l’ozone et les particules fines étant les principaux retenus. Les effets cocktail ne sont nullement pris en compte. Et le coût sanitaire de la pollution de l’air intérieur n’est quasiment jamais intégré ». La mauvaise qualité de l’air intérieur représenterait à elle seule une charge annuelle nette de 19,5 milliards d’euros. Une charge que la commission a préféré ne pas intégrer dans son estimation globale, impacts de la pollution de l’air intérieur et extérieur se recoupant en partie.
Au-delà des dommages sanitaires, la pollution de l’air a également des conséquences non sanitaires directes : impact sur la santé animale et végétale, détérioration des bâtiments. Réalisant un premier chiffrage avec les données disponibles, complété des dépenses liées aux politiques de prévention et de surveillance de la qualité de l’air, la commission estime, là encore « a minima », ce coût non sanitaire à 4,3 milliards d’euros.
L’ensemble de ces coûts doivent être appréciés au regard des bénéfices tirés de la prévention et la lutte contre la pollution, soulignent cependant les sénateurs. Selon l’Institut national de l’environnement et des risques (Ineris), le respect des normes de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) – aujourd’hui fréquemment dépassées en France –, pourrait générer un bénéfice sanitaire net de 11 milliards d’euros par an. Un chiffre qui, pour eux, encourage la mise en œuvre de politiques volontaristes. La commission formule une soixantaine de propositions pour lutter « efficacement » contre ce fléau, dont la mise en place d’une véritable fiscalité écologique et un renforcement des normes existantes.