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4 Sep 2016 | Observatoire
 

ObesiteIl n’y a pas que le tabac. Les Échos daté des 2 et 3 septembre fait état d’une étude sur « le coût socio-économique des kilos en trop » dans notre pays.
Conclusion : « les kilos en trop de 30 millions de personnes coûteraient 20,4 milliards d’euros par an (…) Ce coût est à mettre en parallèle avec celui du tabac (26,6 milliards d’euros) et de l’alcool (15 milliards d’euros) » (voir Lmdt des 21 novembre 2014 et 16 août 2012).

Tiens, tiens … d’où viennent ces chiffres repris par le quotidien économique ? D’une étude de la Direction générale du Trésor. De Bercy donc. Et qu’y trouve-t-on ?

•• Des constats : en 2012, 24,6 millions de Français sont en surpoids, soit le tiers de la population (32,3 %). Il y a 35 ans, 5 % de la population souffraient d’obésité. Nous en sommes à 15 %.

Soit  une consommation de soins supérieure à la normale. Soit 17 milliards d’euros de dépenses pour l’assurance-maladie, 7 milliards de coûts de journées non-travaillées, etc. Tout cela « corrigé » des économies engendrées par la mortalité précoce. On arrive à 20 milliards et quelques grammes …

•• Les remèdes ? La fiscalité à tout-va.

Le Trésor propose la suppression de la contribution actuelle sur les boissons sucrées et édulcorées pas assez « performante » (400 millions d’euros par an), tout comme de la taxe « Redbull » (3 millions ; 20 fois moins que le rendement attendu …),  en arrêtant de viser seulement un ou plusieurs nutriments (comme le sucre).

Mais en tapant plus large : sur la valeur calorifique et le gain nutritionnel des boissons et aliments. Une taxe globale sur la malbouffe … dont on imagine encore confusément les critères. Sinon, quelques points de TVA en plus sur le taux réduit appliqué à la plupart des aliments pourraient faire l’affaire.

Autres suggestions : fixer des portions standards et limiter la taille des assiettes dans les cantines (sic) ; interdire les distributeurs de confiserie en verre (re-sic); réglementer encore plus la publicité ; aller plus loin dans l’étiquetage nutritionnel.

•• On est confondu par l’ingénuité de ces propositions.

Pourquoi et comment taxer ainsi, au nom d’une sorte d’« immanente justice sanitaire »,  alors que les relations entre chaque individu et sa façon de boire et de manger sont tellement complexes ? Et différentes ?

Pourquoi et comment taxer sur ce qui est aussi du plaisir et du besoin de compenser des déséquilibres de la vie ?

Pourquoi et comment taxer des comportements induits par les inégalités génétiques ?

Pourquoi et comment taxer indirectement des façons de vivre alors que l’accès aux activités sportives et de dépense physique est si inégal ?

Et pourquoi et comment taxer alors que la bonne alimentation dépend aussi du niveau de vie ?

Une étude du Lancet fait ressortir justement qu’en France, la population des personnes vivant avec moins de 900 euros par moi compte 25,6 % d’obèses (7 % parmi les plus de 5 000 euros). « Rien n’empêcherait d’adjoindre à cette taxation une mesure de redistribution » lâche-t-on du côté des auteurs de l’étude. Il fallait y penser.

Enfin, cette logique de taxation butte vite sur la réalité de la circulation des denrées et boissons  d’un pays à un autre, au rythme de la globalisation. Comme le tabac, d’ailleurs.

Là où une politique digne de ce nom passerait par un puissant travail de prévention et d’éducation, une ambitieuse politique de qualité de la nourriture  ainsi qu’une traçabilité alimentaire minutieuse … on nous sert de la mesurette fiscale et communicante.

•• Vendredi matin, Bercy entamait un remarquable exercice de rétropédalage (bon pour le régime) « Non, il n’est pas question de regrouper toutes les taxes en une seule taxe qui tiendrait compte des calories » (Christian Eckert sur RTL) ; « J’ai pas trop envie de retenir ces propositions » a renchéri  Michel Sapin (sur Radio Classique) en rappelant que le gouvernement tentait de « baisser les impôts et supprimer les taxes ». On retiendra particulièrement ce dernier point.

(Voir aussi Lmdt des 20 juillet 2016 et 23 septembre 2015).