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4 Jan 2015 | Observatoire
 

CancerSelon deux chercheurs américains du Johns Hopkins Kimmel Cancer Center (Baltimore), dont les travaux sont publiés dans la revue Science du 2 janvier, le cancer serait une histoire de malchance plus que d’environnement ou de mauvais gênes.

D’après leurs estimations, les deux tiers de l’incidence des tumeurs malignes de l’adulte relèveraient essentiellement d’un mauvais hasard, dû à des mutations aléatoires survenant lors des divisions des cellules souches. Les facteurs de risques classiques (tabac, alcool, alimentation, polluants, etc.) ou une susceptibilité génétique n’intervenant que dans un tiers des cas.

Pour évaluer la part du hasard comparativement aux autres facteurs, les chercheurs ont pris en compte la dynamique de renouvellement des cellules souches dans les tissus (plus le nombre de divisions est élevé, plus le risque de mutations aléatoires, et donc de cancer, augmente). Ils ont sélectionné 31 cancers, pour lesquels ces données étaient disponibles, et les ont mises en regard de l’incidence de chaque tumeur au cours de la vie de la population américaine. La corrélation s’est révélée très nette. Par exemple, les cellules souches du colon se divisent quatre fois plus que celles de l’intestin grêle. D’où un nombre plus élevé de cancer.

Les cancers ont ensuite été classés en deux groupes. Dans le premier, 22 cancers (dont ceux du pancréas, les mélanomes, les tumeurs du poumon des non-fumeurs) où le rôle du hasard est prépondérant. Le deuxième correspond aux neuf tumeurs (cancers du colon, du poumon des fumeurs, etc.) dans lesquelles d’autres facteurs sont clairement impliquées. Même dans ce groupe, la dynamique de renouvellement des tissus joue un « rôle essentiel », souligne les auteurs, les effets de l’environnement et la génétique venant s’ajouter.

« En fait, ces résultats confortent la théorie classique selon laquelle les cancers sont une maladie du vieillissement, puisque les risques sont proportionnels au nombre total de divisions des cellules souches » commente le professeur français Fabien Calvo (Institut Gustave Roussy), directeur scientifique de Cancer Core Europe. « Depuis quelques années, il y a beaucoup d’emphase sur les causes exogènes de cancers, … mais ces travaux confirment que ce sont avant tout des maladies de personnes âgées » confirme le cancérologue Fabrice Denis.

Deux bémols, toutefois, à ces conclusions. Les deux tumeurs les plus fréquentes (sein et prostate) n’ont pas été prises en compte dans l’étude. Enfin, selon les spécialistes français, le rôle de produits cancérigènes, tels le tabac, resterait majeur : pour le poumon, le risque « spontané » serait multiplié par 70 ; le tabac serait impliqué dans 17 types de cancers et responsable de plus de 20% de la mortalité par ces maladies dans le monde.