Après quatre mois et demi d’interdiction, le Gouvernement vient d’autoriser de nouveau la vente de cigarettes (voir 16 et 20 août).
Si les quelque 8 millions de fumeurs sud-africains estimés se réjouissent, les fabricants de tabac craignent de voir perdurer l’essor du marché illégal qui s’est envolé à la faveur des restrictions. Enquête du Monde.fr de ce 19 août. Extraits.
(…) D’après une étude de l’université de Capetown, 93 % des fumeurs ont continué d’acheter des cigarettes malgré l’interdiction en vigueur. Les prix ont été multipliés par trois en moyenne, et les marques des multinationales du secteur sont devenus presque introuvables au fil des semaines au profit de la contrebande.
•• À la frontière avec le Zimbabwe, haut lieu de contrebande, le business continue de tourner à plein régime, malgré la construction, à la hâte, d’une clôture en fil barbelé, par exemple. Sur place, les petits trafiquants se vantent de faire toujours quotidiennement l’aller-retour avec le Zimbabwe (voir 28 juillet).
Achetée 100 rands (5 euros) de l’autre côté de la frontière, une cartouche de marque locale peut être revendue six fois plus à Johannesburg. Les réseaux organisés peuvent passer plus de 100 000 euros de marchandise en une nuit, assurent certains contrebandiers.
•• En 2018, selon une étude Ipsos financée par la FITA (Fair Trade Independent Tobacco Association qui représente 80 % des fabricants de tabac locaux) , le commerce illégal de cigarettes représentait 30 % du marché sud-africain.
Malgré la levée de l’interdiction, les fabricants craignent désormais de se voir toujours débordés par le commerce illégal. « Les revendeurs ont pris de l’importance en termes de distribution, de disponibilité, ils ont trouvé de nouveaux moyens de vendre leurs produits illicites », assure Bongani Mshibe, de Japan Tobacco International.
•• En quatre mois, le marché illégal a eu le temps de vraiment s’organiser. Si les cigarettes se trouvent sans mal dans la rue, en particulier dans les townships, les résidents des banlieues plus aisées ont pris l’habitude d’échanger des numéros de téléphone pour se faire livrer.
Au lendemain de l’annonce présidentielle, l’une de ces « plates-formes téléphoniques » organisait le déstockage à prix réduits, tout en proposant aux clients de la marque la plus vendue de rembourser une partie des cartouches non consommées.
•• En incluant producteurs de tabac, fabricants, distributeurs et détaillants, la filière Tabac estime compter près de 300 000 emplois en Afrique du Sud.