Rachat de ZEturf, lancement d’Eurodreams, projet Jonum, casino en ligne … Stéphane Pallez se confie, dans Les Échos, sur l’actualité des jeux d’argent et sur la stratégie du groupe. Et elle annonce être candidate à sa succession.
•• Faut-il autoriser le casino en ligne ?
S. P. : C’est d’abord une question qui s’adresse au Gouvernement, au législateur et au régulateur. Est-ce qu’il est souhaitable d’autoriser les casinos en ligne ? Il faut bien être conscient que c’est un modèle de jeu beaucoup plus addictif.
Sur la régulation, on peut évaluer ce qui s’est passé dans les pays qui ont suivi ce raisonnement, comme la Norvège, où un cadre a été mis en place pour offrir des licences de casino en ligne. Le casino en ligne légal s’est développé, mais l’offre illégale est toujours présente, tandis que les risques de jeu excessif explosent.
•• Votre mandat prendra fin au printemps. Souhaitez-vous poursuivre l’aventure ?
S. P. : Je suis candidate à un nouveau mandat pour continuer à développer et à transformer cette entreprise exceptionnelle. J’en ai informé notre conseil d’administration et donc nos principaux actionnaires. Le conseil d’administration devra donc prendre position au plus tard en début d’année pour être en mesure de proposer les résolutions nécessaires à l’assemblée générale d’avril prochain.
•• Vous venez de boucler le rachat de ZEturf, pourquoi ce choix ?
S. P. : Cela correspond à notre stratégie, qui est de construire un opérateur en ligne sur l’ensemble des verticales du marché français. Cela s’est déjà matérialisé avec le lancement de notre offre de poker en ligne en 2022, qui fonctionne très bien. Une opportunité s’est présentée pour y adjoindre une offre de pari hippique en ligne.
Cela nous permettra d’être plus attractifs et compétitifs, de bénéficier d’un effet de taille. Mais aussi d’un effet d’optimisation entre nos différentes activités en concurrence s’agissant des ventes, des recrutements de joueurs, et de la rétention.
On le constate déjà entre le poker et les paris sportifs. Cela génère des synergies marketing qui bonifient notre modèle économique d’opérateur en ligne. Avec ZEturf, les synergies seront plus significatives car nous allons doubler notre chiffre d’affaires sur les jeux en ligne en concurrence (voir 30 septembre).
•• Quelles seront les conséquences concrètes ?
S. P. : Nous n’avions pas la taille que nous souhaitions avoir pour être à un niveau qui nous permette d’être pleinement dans la compétition. Avec l’acquisition de ZEturf, nous devenons le 4ème acteur des jeux en ligne en concurrence en France et nous comptons bien continuer à progresser.
Maintenant que l’Autorité de la Concurrence a rendu son avis, nous allons pouvoir passer à l’intégration, qui va prendre un peu de temps. A la fin, nous aurons un portail commun sur lequel nos clients en concurrence auront accès à la totalité de notre offre.
Sur le plan comptable, nos activités en concurrence sont déjà gérées de manière séparée de nos activités en monopole. Mais nous allons aller encore plus loin à l’occasion de cette intégration, car nous allons filialiser nos activités en concurrence.
•• Vous avez récemment annoncé l’acquisition de votre équivalent irlandais (PLI), pour 350 millions. Où en est-on ?
S. P. : Pour PLI, cela va aller très vite, puisque nous avons eu l’autorisation du régulateur irlandais, et l’opération sera bouclée début novembre. C’est un jalon stratégique fondamental, car c’est la première fois que nous allons gérer directement une loterie à l’étranger, en BtoC.
C’est un mouvement majeur, et nous allons y consacrer beaucoup d’énergie et beaucoup de nos talents. Nous serons l’opérateur de droits exclusifs concédés par l’État irlandais et, cela, au moins jusqu’en 2034, date de renouvellement de la licence actuelle.
Nous allons être en mesure de leur apporter notre savoir-faire dans la loterie, en particulier dans les jeux instantanés et dans le digital. En termes de taille, nous sommes à peu près 10 fois plus gros, ce qui signifie des capacités de développement technologique et marketing plus importantes, et donc des synergies de revenus et de coûts.
•• Cela présage-t-il d’autres acquisitions ?
S. P. : Nous avions dit, il y a un an, que notre ambition était d’être de plus en plus un opérateur BtoC, aussi bien pour les jeux de loterie que les paris sportifs en ligne. Si d’autres opportunités se présentaient, nous les regarderions avec attention.
•• Sur le texte de loi et en passe d’être adopté pour fixer le statut des jeux à objets numériques monétisables (Jonum), comme Sorare, Stéphane Pallez a précisé : « nous sommes favorables à un nouveau cadre pour favoriser l’innovation dans les jeux d’argent (…) Nos interrogations sur ce texte ont trait à la bonne prise en compte de ces risques en termes d’obligations imposées aux opérateurs, qui justifient la vérification d’identité à la création d’un compte (…)
Il n’est pas prévu de fiscalité sur ces jeux, et cela interroge, puisque le secteur des jeux d’argent et de hasard, lui, est significativement fiscalisé. Le risque est de créer une distorsion de concurrence, voire une niche réglementaire et fiscale où certains pourraient s’engouffrer … ». Photo : FDJ