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10 Mar 2017 | Trafic
 

Sur le sujet de la traçabilité tabac, qui intéresse de plus en plus les médias (voir Lmdt du 6 mars), le site spécialisé Contrefaçon-Riposte a mis en ligne le 6 mars, son analyse que nous reproduisons intégralement.

« Un projet de loi « visant à renforcer la lutte contre le commerce illicite des produits du tabac » a été déposé, le 22 février 2017, à l’Assemblée nationale par une quarantaine de députés (voir Lmdt du 26 février). Celui-ci vise à mettre en place un système de traçabilité réellement indépendant des producteurs de tabac, conformément au protocole de l’Organisation mondiale de la santé et que la France a signé en octobre 2015. Le projet de loi vise aussi à renforcer les sanctions pour le commerce de produits illicites.

Selon l’exposé des motifs du projet de loi, le commerce parallèle du tabac occasionne, « un manque à gagner fiscal de près de 3 milliards d’euros par an et une perte de 250 millions d’euros pour les buralistes français. » Une situation qui « a tendance à s’aggraver, entraînant la fermeture de près de 1 000 bureaux de tabac chaque année ».

•• Le problème est que « ce commerce parallèle n’est pas composé de cigarettes contrefaisantes, mais principalement de vraies cigarettes, fabriquées et commercialisées par les fabricants de tabac eux-mêmes. Ces cigarettes nourrissent le commerce parallèle de deux façons :

• soit elles sont vendues par les fabricants de tabac à des intermédiaires installés dans des pays de l’Est de l’Europe notamment (Ukraine, Kosovo…) où les taxes sont extrêmement faibles, cigarettes qui sont ensuite acheminées par containers ou par camions dans les pays à forte fiscalité. Ce sont ces cigarettes qui font l’objet des prises médiatisées de la Douane ;

• soit elles sont vendues par les fabricants de tabac dans des pays de l’Europe de l’Ouest qui pratiquent une fiscalité sur le tabac douce. Les fabricants de tabac « surapprovisionnent » ainsi les vendeurs de tabac en Andorre, au Luxembourg, les vendeurs de tabac belges et espagnols proches de la France, pour alimenter les fumeurs et non-fumeurs (qui achètent eux pour revendre) originaires des pays à forte fiscalité sur le tabac ».

•• Pour mettre en place une traçabilité indépendante, le projet de loi prévoit pour commencer de supprimer les articles L. 3512-23, L. 3512-24, L. 3512-25 et L. 3512-26 du Code de la Santé publique, car ceux-ci font référence à une traçabilité contrôlée par les fabricants de tabac eux-mêmes.

Il s’agira ensuite (probablement via un appel d’offres) de choisir un système de traçabilité à la fois économique, fiable et performant. Il en existe plusieurs sur le marché et pas seulement celui de la société Suisse SICPA (voir Lmdt des 7 octobre et 5 avril 2016). Les acteurs impliqués dans la traçabilité de l’origine des médicaments de prescription, qui doit se mettre en place en Europe avant le 9 février 2019, pourraient y trouver leurs comptes.

•• De leur côté, tous les grands cigarettiers qui utilisent la solution Codentify, développée par Philip Morris et la DCTA (Digital Coding and Tracing Association), depuis l’an 2000 (voir Lmdt du 2 avril 2014), sentant le vent tourner, ont cédé en juin 2016, pour un euro symbolique, les droits de propriété intellectuelle de Codentify à la société Suisse Inexto SA (voir Lmdt du 26 juin 2016), créée pour la circonstance. Celle-ci est une filiale du groupe français Impala qui détient notamment la société Arjo Solutions, un acteur de référence de la traçabilité et de l’authentification des produits. À partir de ce savoir-faire, Inexto souhaite « proposer de nouvelles solutions performantes, innovantes et indépendantes de traçabilité, notamment pour les industries à fort volume (industrie pharmaceutique, alimentaire, tabac, les boissons, etc.) ».

•• Un autre aspect important sera de savoir à quel cahier des charges devra se soumettre le ou les prestataires indépendants qui devront gérer le ou les systèmes de traçabilité des produits du tabac dans les différents pays de l’UE. Devront-ils se soumettre à des cahiers des charges nationaux différents ou un cahier des charges européen unique ? Dans tous les cas, si plusieurs systèmes nationaux coexistent, ceux-ci devront être interopérables.

•• Par ailleurs, un point essentiel sera de garantir la fiabilité des données traitées. C’est-à-dire, en premier lieu, l’indépendance absolue des unités de marquage et des capteurs de données qu’il faudra implanter :
• d’une part, sur les différentes lignes de production des produits du tabac destinés au marché européen. Il est évident qu’un seul ou très peu de prestataires agréés auront ce privilège ;
• d’autre part, pour gérer le réseau de capteurs qui assurera un suivi strict de la logistique et de la distribution des produits en évitant toute fuite vers les marchés parallèles.

Selon, un article de BFM Business, publié ce jour, l’enjeu financier pour le prestataire retenu par la France serait « d’environ 80 millions d’euros ». Mais, l’on comprend que ce choix fasse l’objet d’une importante partie de bras de fer, dans la mesure où la référence de la France constituera pour le prestataire retenu un atout pour accéder aux autres marchés européens.