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14 Oct 2016 | Profession
 

Tabaculteur lot-et-garonne

Vivant et plein d’enseignement … ce grand reportage paru dans Sud Ouest du 12 octobre. Son titre : « La production, vers un nouveau coup de tabac ». Un sujet auquel n’a pu échapper une certaine députée bordelaise, Michèle Delaunay. Extraits.

•• Soleil

« Les séchoirs de Pascal Raffaello sont garnis des récoltes de l’été. Grâce au soleil et au vent de la vallée de la Garonne, les feuilles de tabac abandonnent lentement leur couleur verte au profit du blond : il faudra bientôt passer à l’eufeuillisation, la séparation des feuilles de la tige du plant. Sur cette exploitation du Puch-d’Agenais dans le Tonneinquais, les séchoirs à tabac en bois à l’architecture si typique du Lot-et-Garonne ont laissé la place à des hangars modernes, dont la toiture est recouverte de panneaux photovoltaïques.

« Depuis que les sources de subventions se sont taries – PAC disparue, aides envolées -, il a fallu trouver d’autres financements pour continuer à se développer. Au lieu-dit Bonhomme, un investisseur a construit à Pascal des séchoirs tout neufs ; en échange, il profite de l’électricité produite pour la revendre.

•• Valeur sûre

« Depuis qu’il a repris, en 2000, l’exploitation de son père – que celui-ci tenait lui-même de son père, tabaculteur italien venu s’installer en Lot-et-Garonne en 1947 -, Pascal a plus que doublé la surface dévolue au tabac : de 4 à 9 hectares aujourd’hui. La surface est marginale au regard de la taille de l’exploitation du Lot-et-Garonnais (140 hectares) qui produit aussi des légumes et des céréales.

« C’est pourtant grâce à ces 9 petits hectares que le tabaculteur s’assure des revenus stables tous les ans : « les céréales, c’est basé sur des cours mondiaux volatils qui peuvent varier du simple au double en un an. On ne sait jamais combien produire pour s’en sortir. Si je n’avais pas le tabac, je plierais boutique car je n’aurais pas de visibilité. Pour moi, c’est une valeur sûre ».

•• Stratégie mise en cause

« Pascal Rafaello fait partie des 230 adhérents de Tabac Garonne Adour (TGA / voir Lmdt du 15 février). Cette coopérative a mis en place une stratégie de développement « made in France » en créant sa propre société de commercialisation de tabac à rouler, Traditab, basée à Tonneins (voir Lmdt des 11 octobre et 27 juin). Le but est de valoriser la « technicité » et le « savoir-faire » du tabac français », explique Céline Brun, chargée de qualité chez TGA.

« C’est cette qualité et cette spécialisation qui sont recherchées sur le marché » abonde Éloïse Besnard, responsable marketing de Traditab. Corollaire de cette spécialisation : la société peut acheter plus cher son tabac aux producteurs pour leur assurer un meilleur revenu. Mais déjà handicapée par la mise en place du paquet neutre – qui limite la visibilité de la marque, donc son positionnement plus qualitatif – la stratégie de Traditab pourrait être remise en cause par une hausse de 15 % de la fiscalité sur le tabac à rouler (…) Et comme cela ne suffisait pas, elle pourrait également être soumise à une nouvelle « contribution sur les chiffres d’ affaires des fournisseurs agréés de tabac » annoncée dans le Projet de Loi de Financement de la Sécurité sociale (voir Lmdt des 30 septembre et 6 octobre).

•• Conséquences 

« Cette taxe », argumente Éloïse Besnard, « va réduire la marge de Traditab et freiner nos projets de développement, alors que nous avons 35 salariés et participons à l’activité de 235 tabaculteurs du Sud-Ouest ».

La mesure agace et inquiète Pascal Rafaello qui emploie 25 équivalents temps pleins sur l’année pour la tabaculture : « nous avons la fierté d’avoir un produit français qui plait au consommateur et on nous taxe encore. Nous sommes tellement liés à Traditab que si son développement est touché, cela nous enlèvera des marges de manœuvre ».

« Il faut arrêter de faire comme s’il n’y avait plus de producteurs de tabac en France. S’en prendre à eux ne résoudra pas les problèmes sanitaires liés au tabac » peste Céline Brun.