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3 Juin 2015 | International, Profession
 

Caballero AvocatAutre réaction sur la possibilité « d’action de groupe à la française » après la condamnation par la justice québécoise de trois fabricants de tabac dans le cadre de recours collectifs de fumeurs (voir Lmdt des 2 juin 2015 et 12 décembre 2014). Dans Libération de ce mercredi 3 juin, Maître Francis Caballero – l’avocat du Comité national contre le Tabagisme et de plaignants dans trois procès civils intentés contre Seita (voir Lmdt des 17 juin 2013 et 21 juillet 2014) – rejoint l’avis négatif d’Yves Bur (voir Lmdt de ce jour), même s’il estime que les choses sont en train d’évoluer …

« Non, c’est doublement impossible. Tout d’abord, parce que les actions de groupe, autorisées en France depuis la loi Hamon de 2014, sont limitées au champ de la consommation et ne peuvent être engagées que par seize associations de défense des consommateurs agrées par l’Etat. Ces actions ne seraient donc pas possibles pour des affaires de santé publique (…) La deuxième raison est qu’il existe, en France, une jurisprudence qui protège les compagnies du tabac de la reconnaissance de leurs responsabilités. Ce sont les trois procès que j’ai perdus qui en sont à l’origine (…)

« Les choses ont changé. Il y a eu une prise de conscience de l’implication des multinationales et de leurs calculs pour encourager la consommation de tabac (…) Pour qu’une telle action aboutisse il faudrait s’attaquer aux marques américaines. De toute façon, il n’existe plus de fabricant français, ils ont tous été rachetés. Si un avocat doué se lançait dans la défense d’une veuve de Philip Morris, par exemple, je pense qu’il aurait des chances de gagner (...) 

« L’intérêt (d’une action de groupe), c’est bien sûr la publicité médiatique d’une telle procédure. Imaginez, au Québec, ils étaient plus d’un million, c’est incroyable (…) Ce sont des procès très couteux pour les cabinets d’avocats et les plaignants. Aux Etats-Unis, ils rentabilisent ce type d’action en avançant les frais aux parties civiles, puis en récupérant une partie des bénéfices en cas de victoire. C’est gagnant-gagnant. En France, ce n’est pas vraiment autorisé, et ce n’est pas dans la culture locale. De toute façon, les possibilités d’actions de groupe sont trop restreintes pour que de tels cas se produisent (…)

« En France, une région ou une mairie pourrait se porter partie civile mais de quel droit pourrait-elle demander des réparations? Elle ne peut pas représenter des victimes du tabac. Dans le cas d’un procès mené par l’Etat français, ce serait compliqué. Les industriels du tabac pourraient répondre qu’ils paient déjà 15 milliards d’euros par an de taxes, dont 12 milliards vont directement dans le budget de la Sécurité sociale ».